Le Sommet des Amériques s'est ouvert vendredi sur une poignée de main en coulisses entre les présidents américain Barack Obama et cubain Raul Castro, qui doivent avoir samedi des échanges historiques dans la foulée de leur dégel annoncé mi-décembre.

Selon Bernadette Meehan, une porte-parole de la Maison-Blanche, les deux hommes se sont serré la main et ont échangé quelques mots peu avant l'ouverture officielle du sommet, comme ils l'avaient fait en décembre 2013 en Afrique du sud, en marge des obsèques de Nelson Mandela.

Une source proche de la délégation américaine a toutefois précisé qu'il y avait pas eu de «conversation substantielle» entre les deux hommes, ce qui selon la Maison-Blanche devra attendre samedi.

Ce très attendu premier face à face entre chefs d'État des deux pays depuis 1956 doit sceller le réchauffement annoncé au terme de 18 mois de tractations menées dans le plus grand secret, qui ont permis de tourner la page de 53 ans de conflit.

Le Sommet des Amériques «présente une dimension vraiment spéciale (...) c'est la première fois de l'Histoire que se réunissent à la même table les 35 chefs d'État et de gouvernement» de la région, s'est réjoui dans son discours inaugural le secrétaire général de l'Organisation des États américains (OEA), Jose Miguel Insulza, employant également le terme d'«historique».

Cuba effectue son retour dans cette grand-messe continentale dont elle restait exclue par les États-Unis et l'OEA depuis sa première édition en 1994.

«La présence aujourd'hui du président de Cuba Raul Castro concrétise une aspiration de longue date de la région», s'est félicité en tribune le secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon.

Après les discours de samedi, les dirigeants ont participé à un dîner officiel dans la vieille ville de Panama. Ils doivent se retrouver samedi matin pour des sessions plénières.

Obama avec des dissidents 

Dans la journée de vendredi, Barack Obama a rencontré des défenseurs des droits de l'Homme des Amériques, dont deux dissidents cubains, Laritza Diversent et Manuel Cuesta Morua, dans une initiative susceptible de froisser La Havane.

Avant cette réunion, M. Obama avait assuré aux militants des droits de l'Homme de la région qu'il était «à leurs côtés» sans «chercher à faire valoir les intérêts» américains.

De son côté, Raul Castro s'est entretenu avec M. Ban ainsi qu'avec un haut représentant du capitalisme mondial, le président de la Chambre de commerce américaine Tom Donohue.

Pour préparer ce sommet, MM. Obama et Castro se sont parlé au téléphone cette semaine, pour la deuxième fois après leur échange direct du 17 décembre dernier qui avait précédé l'annonce surprise du rapprochement entre les deux pays.

L'annonce du dégel entre les ennemis de la Guerre froide ouvre la voie à de longues et âpres négociations pour résoudre de nombreux points de contentieux hérités de plus d'un demi-siècle d'affrontements.

Jeudi soir, un sénateur démocrate a indiqué que le Département d'État avait entamé les démarches pour la levée d'un premier obstacle: la présence de Cuba dans la liste américaine des pays soutenant le terrorisme.

Le retrait de cette liste est la principale condition posée par Cuba à la réouverture d'ambassades dans les deux pays, même si M. Obama a prévenu que cela «prendrait du temps».

Une nouvelle ère

Soucieux de reprendre pied sur le continent après avoir déminé la question cubaine, M. Obama devra faire face à de nombreux pays latino-américains outrés par sa récente décision de signer un décret qualifiant le Venezuela, principal partenaire économique de Cuba, de «menace» pour la sécurité intérieure des États-Unis.

Le président vénézuélien Nicolas Maduro compte d'ailleurs remettre lors de ce Sommet plus de 13 millions de signatures à M. Obama en faveur de l'annulation de ce décret.

Dans un souci d'apaisement, la Maison-Blanche a expliqué qu'elle cherchait à établir «un dialogue direct avec le Venezuela, même si nous savons qu'il y aura des différences entre nos deux gouvernements sur plusieurs questions».

Devant le Forum de la société civile, M. Obama a voulu souligner l'avènement d'une nouvelle ère dans les relations au sein de l'hémisphère occidental.

«Les temps où nous considérions si souvent que les États-Unis pouvaient mener des ingérences dans l'impunité (en Amérique latine) sont révolus», a-t-il martelé.