Sitôt réélue, la présidente brésilienne Dilma Rousseff a été pressée lundi par les marchés de répondre aux défis de la relance économique du géant émergent d'Amérique latine.

Au lendemain de sa victoire sur son rival de centre-droit Aecio Neves, qui avait la faveur des marchés financiers et des secteurs économiques, Mme Rousseff n'a pas vraiment eu le temps de savourer les messages de félicitations des présidents américain Barack Obama et russe Vladimir Poutine.

Les marchés financiers se sont immédiatement rappelés au bon souvenir de la présidente, qu'ils ont prise en grippe, la tenant pour responsable de l'entrée récente du Brésil en récession au premier semestre, sur fond d'inflation élevée (6,75%) et de dégradation des finances publiques.

La Bourse de Sao Paulo a plongé de 2,77% après avoir ouvert en chute libre de 6% à l'ouverture, tandis que le réal s'est déprécié de 2,58% à 2,52 réais pour un dollar américain.

Les marchés ont châtié le géant étatique Petrobras, au coeur d'un scandale de corruption et dont les bénéfices sont plombés par la politique gouvernementale de contrôle des prix à la vente des carburants. L'action de la première entreprise brésilienne a chuté de 11,35%.

Limiter les pertes 

«Le marché a réagi au résultat des élections. Plusieurs noms ont circulé concernant le futur ministre des Finances, contribuant à une trêve» qui a limité les pertes, a expliqué à l'AFP Andre Leite, analyste chez TAG Investments.

«Si le prochain ministre a un profil plus orthodoxe, le marché réagira positivement. Sinon, cela pourrait empirer», a-t-il ajouté.

Le ministre sortant des Finances, Guido Mantega, a souligné la détermination du gouvernement à «retrouver le cycle de croissance de l'économie brésilienne en 2015, en impliquant les acteurs économiques».

Brasilia veillera au respect «des fondamentaux budgétaires», au contrôle de la dette et de l'inflation, a-t-il insisté. Tout en soulignant que la réélection de Mme Rousseff reflétait l'approbation de ses choix par les Brésiliens.

La candidate du Parti des travailleurs (PT) a été réélue dimanche avec 51,64% des voix contre 48,36% pour son adversaire de centre-droit Aecio Neves, qui promettait un coup de barre libéral pour regagner la confiance des investisseurs et relancer la septième économie mondiale.

«Le premier défi de la présidente sera d'annoncer sa ligne économique sur les finances publiques. Elle doit tenter de regagner la confiance», a indiqué à l'AFP José Francisco Lima, économiste en chef de la banque d'investissements Fator.

Mme Rousseff a annoncé dimanche soir, peu après sa victoire, qu'elle prendrait des mesures de relance en concertation avec les secteurs économiques tout en veillant au maintien d'un taux de chômage historiquement bas et à la poursuite de l'augmentation du salaire minimum.

Combat contre l'impunité et la corruption

D'autres défis importants attendent Mme Rousseff. Elle a promis de s'atteler à réconcilier un pays divisé au sortir d'une virulente campagne électorale qui a radicalisé le clivage gauche-droite.

En signe d'apaisement, elle s'est engagée à placer son second mandat sous le signe du «dialogue», qui n'avait pas été la marque de fabrique de son premier mandat.

Elle a invité les forces en présence à chercher un terrain d'entente autour d'une ambitieuse réforme d'un système politique décrié par les Brésiliens.

Mme Rousseff, qui prêtera serment le 1er janvier, a promis d'engager un combat déterminé contre l'impunité et la corruption en durcissant l'arsenal pénal et en réformant le système de financement des campagnes électorales.

L'éclatement en pleine campagne du scandale des pots-de-vin versés par Petrobras à des élus de sa majorité a ulcéré une grande partie de l'opinion brésilienne.

La présidente risque de voir son second mandat plombé par les révélations de cette vaste affaire politico-judiciaire qui ne fait que commencer.