Des centaines d'enseignants et d'étudiants ont occupé jeudi plusieurs mairies de l'État de Guerrero, dans le sud du Mexique, pour exiger des autorités qu'elles retrouvent les 43 élèves enseignants disparus depuis près de trois semaines.

Plusieurs mairies ont été évacuées préventivement, notamment celle d'Iguala, la ville où ces 43 jeunes entre 17 et 21 ans ont disparu le 26 septembre après une fusillade provoquée par des policiers et des hommes armés, présumés narcotrafiquants, et qui avait fait 6 morts et 25 blessés.

Les étudiants et les enseignants mobilisés, appuyés par des organisations syndicales et sociales de la région, prévoient des blocages de routes et l'occupation de péages sur l'autoroute menant vers la ville touristique d'Acapulco, où est prévue une grande manifestation vendredi.

Outre la mairie de Chilpancingo, capitale de l'État du Guerrero, les manifestants ont occupé les mairies de Tlapa de Comonfort, d'Atoyac de Alvarez et de Huamuxtitlan sans que soient rapportées de violences, a indiqué à l'AFP un responsable du centre de commandement de la police régionale.

À Huamuxtitlan, à 490 km de Mexico, «environ 200 enseignants occupent la mairie et nous sommes respectueux de la manifestation», a expliqué le maire, Johnny Saucedo, par téléphone à l'AFP.

À la mairie d'Iguala, des dizaines d'agents se sont employés pendant la journée à déménager les photocopieuses et des archives confidentielles «par précaution» face à l'éventualité d'une occupation, a dit aux journalistes Oscar Antonio Chavez, chef du cabinet du maire.

Les occupations sont menées par la Coordination régionale des travailleurs de l'éducation de Guerrero (CETEG), une fraction radicale du syndicat national des enseignants.

«Nous n'avons pas la capacité d'occuper les 81 mairies de l'État en un seul jour, aussi notre plan est de le faire de manière progressive», a dit José Angel Baron, porte-parole de la CETEG.

Étudiants en grève

L'absence d'informations sur le sort des jeunes de l'école normale d'Ayotzinapa, ajoutée à la découverte aux alentours d'Iguala de fosses clandestines contenant des cadavres non identifiés, fait monter l'indignation et l'exaspération au Mexique.

Dans la capitale, des milliers d'étudiants de grandes universités ont répondu à un mot d'ordre de grève de 48 heures mercredi et jeudi, très suivi notamment à l'Université nationale autonome du Mexique (Unam), la plus importante du pays, et à l'Université autonome métropolitaine (UAM).

Selon les autorités, les 43 étudiants disparus ont été remis par des policiers municipaux à des membres du cartel des Guerreros Unidos, issu du groupe criminel des frères Beltran Leyva.

Le maire d'Iguala, José Luis Abarca, et son épouse, en cavale depuis le lendemain des événements du 26 septembre, sont toujours recherchés par la police.

La soeur du maire, Roselia Abarca, a accepté de parler à l'AFP. Elle a indiqué que, le 27 septembre, son frère a dit aux membres de la famille : «Je vous charge de ma maison et de mes enfants. Cela va se régler, faites-moi confiance.»

Elle assure ne pas savoir depuis lors où se trouve son frère aîné, qui ne répond plus aux appels de la famille.

Selon elle, les membres de la famille se réunissent tous les soirs à 20h00 et font des «prières pour que les étudiants réapparaissent» et que son frère soit blanchi.

Chute d'un opérateur financier

Les autorités judiciaires ont procédé à l'arrestation de près de 50 personnes, dont 40 policiers, mais admettent qu'elles ne tiennent pas encore les cerveaux du crime et ne peuvent pas en déterminer les motifs.

Toutefois, de plus en plus d'éléments témoignent de l'infiltration des Guerreros Unidos à Iguala.

Le ministère de la Justice a fait état de l'arrestation de Raul Nuñez Salgado, opérateur financier supposé des Guerreros Unidos. Il aurait remis chaque mois l'équivalent de 35 000 euros au sous-directeur de la sécurité publique de la ville d'Iguala. Ce fonctionnaire municipal est également recherché par la police.