Le mystère s'est épaissi mardi autour du sort de 43 étudiants mexicains disparus depuis fin septembre après l'annonce par les autorités qu'aucune trace d'ADN de ces jeunes n'avait été trouvée parmi les 28 premiers corps exhumés de fosses clandestines.

«Nous avons certains résultats pour les premières fosses, et je peux vous dire qu'elles ne correspondent pas à l'ADN que les familles de ces jeunes nous ont donné», a dit le ministre de la Justice, Jésus Murillo Karam, lors d'une conférence de presse.

«Aucun» des jeunes n'a été identifié parmi les corps trouvés le 4 octobre dans cinq fosses proches d'Iguala, dans l'État du Guerrero, dans le sud du Mexique, a-t-il dit. Ces fosses avaient été découvertes sur la base des indications de deux détenus qui avaient déclaré avoir tué 17 des étudiants.

Les expertises sur les premiers corps ont duré dix jours en raison de l'état de calcination des restes découverts, a expliqué M. Murillo Karam.

Outre ces cinq fosses, cinq autres fosses clandestines ont été localisé près d'Iguala, avec un nombre indéterminé de cadavres qui sont encore en cours d'analyse.

Les étudiants disparus, âgés de 17 à 21 ans, tous élèves-enseignants à l'école normale d'Ayotzinapa, connue pour être un foyer de contestation, étaient venus le 26 septembre avec des dizaines d'autres du même établissement à Iguala, à 100 kilomètres de leur établissement, pour selon leurs dires récolter des fonds et manifester.

Ils s'étaient emparés de trois autobus des transports publics pour rentrer chez eux.

Des policiers municipaux et des hommes armés non identifiés, présumés membres du cartel des Guerreros Unidos, avaient tiré sur ces autobus, puis avaient encore ouvert le feu par la suite, avec un bilan de 6 morts et 25 blessés.

Des témoins ont assuré avoir vu des dizaines d'étudiants être emmenés peu après dans des voitures de police vers une destination inconnue. Depuis lors, on est sans nouvelles de 43 d'entre eux.

A la suite de ces événements, 34 personnes ont été arrêtées dont 26 policiers et au moins quatre membres présumés des Guerreros Unidos.

Le maire d'Iguala et son épouse sont, eux, en fuite. Ils sont recherchés pour s'expliquer sur les événements et sont soupçonnés d'avoir ordonné les violences contre les étudiants.

Mardi, M. Murillo Karam a annoncé que 14 nouveaux policiers de la région avaient été arrêtés. Ces policiers de Cocula, une municipalité proche d'Iguala, sont accusés d'avoir participé à la remise des étudiants disparus au groupe criminel des Guerreros Unidos.

Ces nouveaux détenus ont reconnu «qu'ils avaient reçu le groupe d'étudiants et les avaient remis par la suite, entre les municipalités d'Iguala et de Cocula», aux Guerreros Unidos, a précisé Tomas Zeron, directeur des enquêtes criminelles du ministère de la Justice.

M. Murillo Karam a assuré que ces nouveaux détenus avaient donné de nouvelles pistes pouvant mener à ceux qui avaient organisé cette opération qui traumatise le Mexique.

Le président mexicain Enrique Peña Nieto est revenu sur l'affaire mardi en réaffirmant que son gouvernement avait pour objectif «de prendre des mesures qui permettent d'éviter que des événements comme ceux d'Iguala ne se reproduisent».

Selon les autorités, 300 policiers fédéraux étaient mobilisés pour la recherche des disparus pour ce qui reste dans l'immédiat une affaire d'enlèvement qui a provoqué une indignation à l'échelle internationale et de violentes manifestations dans l'État de Guerrero.

Des enseignants et des étudiants masqués ont mis à sac et incendié lundi soir une partie des bâtiments abritant le gouvernement local à Chilpancingo, capitale du Guerrero.

Le autorités du Guerrero ont renforcé les effectifs des forces de sécurité dans cette ville, mais les protestataires ont annoncé qu'il avaient l'intention de «radicaliser» leur mouvement si les autorités ne donnaient pas des informations sur le sort des étudiants disparus.

Des élèves-enseignants de l'État voisin du Michoacan se sont emparés de 35 autobus pour voyager vers le Guerrero afin de renforcer la mobilisation locale.

Des étudiants de l'Université nationale autonome du Mexique (Unam) et de l'Université autonome métropolitaine (UAM), situées dans la capitale, ont lancé de leur côté une grève de 48 heures en soutien aux disparus.

Outre les nouvelles arrestations annoncées, les autorités ont indiqué que l'un des chefs du cartel des Guerreros Unidos, était mort mardi matin.

Benjamin Mondragon, leader des Guerreros Unidos, «était un cerveau» de ce cartel et «a préféré se suicider plutôt que de se rendre», a indiqué un porte-parole de la police fédérale.