Une journaliste brésilienne de renom a relaté mercredi les tortures qu'elle a subies lorsqu'elle était étudiante et enceinte, sous la dictature (1964-85) au Brésil, l'unique pays d'Amérique du Sud n'ayant jamais jugé ces crimes, en raison d'une loi d'amnistie.

Le Brésil reconnaît officiellement quelque 400 morts et disparus pendant cette période, contre 30 000 morts en Argentine et plus de 3200 au Chili.

Dans le cas de cette journaliste, Miriam Leitao, commentatrice économique de Globo et l'une des plus influentes de son pays, les tortionnaires ont notamment utilisé un énorme serpent pour la terroriser.

«Je ne savais pas s'il faisait nuit ou jour, dans une salle obscurcie avec du plastique noir. Et moi là, seule, nue, seulement moi et un boa. Moi et la peur qui était encore plus grande, car je ne voyais rien, mais je savais que le serpent était là», a déclaré la journaliste dans un reportage diffusé par le site Observatoire de la presse.

Mme Leitao a été conduite début décembre 1972 avec son compagnon par un groupe d'hommes armés dans une caserne de l'armée et interrogée.

Ils me demandaient «ce que je faisais, qui je connaissais. Ils me frappaient, me donnaient des coups de pied, me tiraient les cheveux, me tapaient la tête contre les murs. Je saignais de la nuque», a-t-elle raconté.

«Quand je suis entrée je pesais 50 kilos et quand je suis ressortie trois mois plus tard, 39. J'étais enceinte d'un mois quand je suis arrivée et il y avait de grands risques que je perde le bébé», a-t-elle ajouté, parlant de son premier enfant, né sans séquelles.

Miriam Leitao n'avait relaté ses tortures qu'en 1973 devant un tribunal militaire.

Son récit coïncide avec les travaux de la Commission de la Vérité mise en place en 2012 par la présidente Dilma Rousseff, 66 ans, torturée et emprisonnée sous la dictature, lorsqu'elle était dans la guérilla, pour enquêter sur les crimes du régime militaire. Cette commission doit conclure ses travaux en décembre.

La journaliste a décidé de rompre le silence après que les Forces armées eurent déclaré à la Commission de la Vérité qu'il n'y avait eu aucun «écart de conduite» de leurs unités sous la dictature.

«Les militaires ont affirmé qu'il n'y avait eu aucun écart de conduite. Moi j'ai vécu cet écart de conduite», a assuré Mme Leitao, citée par O Globo mercredi.