À 57 jours du Mondial, des centaines de soldats et de policiers d'élite patrouillaient jeudi les rues de Salvador de Bahia, dans le nord-est du Brésil, où la police est en grève depuis mardi soir, ce qui a suscité une vague de pillages et 39 meurtres.

Plusieurs pharmacies, supermarchés, magasins d'appareils électroménagers et de chaussures ont été pillés depuis mardi soir, certains habitants profitant de l'absence de policiers dans les rues de Salvador, l'une des douze villes hôte du Mondial et parmi les plus dangereuses du pays.

Un total de 39 personnes ont été tuées au cours des premières 24 heures de la grève, d'après un bilan officiel.

«C'est un chiffre supérieur à la normale», a affirmé à l'AFP Isaac Jorge, un porte-parole du gouvernement de l'État de Bahia.

Cinquante personnes ont été arrêtées après les pillages, selon les autorités locales, tandis que la télévision Globo montrait des images magasins saccagés et de personnes arrêtées par la police.

«J'ai autorisé l'envoi de troupes fédérales pour renforcer la sécurité publique et assurer la paix à Bahia», a déclaré jeudi la présidente Dilma Rousseff sur son compte Twitter.

«Il est inadmissible que la population de Bahia coure des risques», a souligné Mme Rousseff.

Près de 6000 hommes des forces armées sont déjà à Bahia et 2500 autres seront dépêchés à Salvador (capitale de l'État) et autres villes proches, dans les prochains jours, a indiqué le général Racine Bezerra Lima, commandant de la 6e région militaire responsable de cette région.

Les troupes fédérales patrouillent dans les rues, sont autorisées à faire des fouilles et arrêter des suspects.

La plupart des cours ont été suspendus dans les écoles et le transport public a été réduit. De nombreux commerces ont baissé leur rideau de fer par peur des pillages.

«Nous avons ouvert, mais nous servons les clients derrière les grilles comme si c'était des bandits. Je n'ai pas vu un seul policier dans la rue, on n'a peur de se faire cambrioler», a déclaré au journal Tribuna da Bahia, Carlos Silva, gérant d'un magasin au centre-ville.

Le taux d'homicides dans l'État de Bahia a grimpé de 400 % de 2000 à 2010, à 41,1 pour 100 000 habitants, d'après des statistiques de l'Institut de recherches économiques appliquées (IPEA).

«Grève inconstitutionnelle»

Outre le déploiement de soldats, la présidente Rousseff a autorisé celui de 250 policiers d'élite de la Force nationale, un chiffre qui pourra atteindre 5000 «jusqu'à ce que soient rétablies les conditions normales», d'après le ministère de la Défense.

Salvador va accueillir six matchs de la coupe du monde (12 juin - 13 juillet). Dans la première phase, il recevra les équipes et les touristes d'Espagne, d'Allemagne et de Suisse comme têtes de série, outre la Hollande, la France, le Portugal, l'Iran et la Bosnie.

La justice de Bahia a décrété mercredi cette grève comme étant «illégale» et infligé une amende de 50 000 reais par jour (plus de 24 000 $) au syndicat des grévistes s'ils ne reprennent pas le travail.

«La grève est illégale, inconstitutionnelle et porte préjudice directement à la population», a souligné le porte-parole du gouvernement de Bahia. Les revendications salariales des grévistes ne cessent d'augmenter et dépassent la capacité du budget de l'État de Bahia, a-t-il ajouté.

En principe, la PM n'est pas autorisée à faire grève au Brésil et le tribunal de Bahia a souligné que le mouvement de grève «bafoue le droit assuré constitutionnellement à la sécurité publique».

Le leader de la grève, Marco Prisco, est président de l'Association des policiers et pompiers de Bahia, mais aussi conseiller municipal du Parti de la sociale démocratie (PSDB), formation d'opposition au gouvernement local du parti des Travailleurs (PT au pouvoir).

Élu après une grève organisée à la veille du carnaval de 2012, période très touristique, qui avait donné lieu à une vague de violences avec 157 morts, M. Prisco viserait maintenant, selon certaines sources, un mandat de député lors des élections générales d'octobre.