Contesté depuis un mois dans la rue par des étudiants et l'opposition, le gouvernement vénézuélien de Nicolas Maduro commémorait mercredi en grande pompe la mort d'Hugo Chavez, terrassé par un cancer il y a un an après 14 années au pouvoir.

Nicolas Maduro, vêtu d'un costume sombre barré de l'écharpe présidentielle, a lancé la journée d'hommages en paradant avec son épouse à bord d'une limousine dans l'ouest de Caracas, avant un défilé civilo-militaire.

«Un an après le départ de notre commandant en chef, la révolution bolivarienne est debout, victorieuse, en ordre de bataille vers le socialisme», a ensuite scandé le successeur et héritier politique d'Hugo Chavez, cible depuis un mois d'une vague de manifestations d'étudiants et de l'opposition.

Ce mouvement, lancé le 4 février en province, juge le gouvernement responsable de l'insécurité, d'une inflation record (plus de 56% en 2013) et de pénuries récurrentes de produits de première nécessité. Les violences, qui ont accompagné les manifestations, ont déjà fait 18 morts et au moins 260 blessés.

Comme ils le font régulièrement depuis plus d'un mois, étudiants et sympathisants de l'opposition ont à nouveau manifesté mercredi dans l'est de Caracas, bastion de l'opposition. Mais la mobilisation était nettement inférieure à celle constatée ces jours derniers.

Non loin de là dans l'après-midi, la garde civile a dispersé environ 500 manifestants radicaux à l'aide de gaz lacrymogènes aux abords de la place Altamira, où des accrochages quotidiens surviennent depuis trois semaines.

De l'autre côté de la capitale, s'est déroulé comme prévu un défilé de plusieurs catégories socio-professionnelles, qui a précédé celui d'un équipement militaire dernier cri, acquis récemment à grands frais grâce à la rente pétrolière.

«Les groupes violents avaient menacé de bloquer le pays, celui-ci fonctionne librement dans le calme», s'est réjoui M. Maduro dans son discours d'hommage.

Parmi les chefs d'État de pays «amis» venus saluer l'ancien président (1999-2013), figuraient le Bolivien Evo Morales et le Cubain Raul Castro, qui a déposé dans la matinée une rose sur le cercueil du «Comandante».

Par contre, M. Maduro a rompu mercredi les «relations politiques et diplomatiques» et gelé les relations commerciales avec le Panama, lui reprochant d'avoir proposé une réunion de l'OEA (Organisation des États Américains)pour débattre de la question des manifestations en cours au Venezuela.

Canons et feux d'artifice contre cacerolazo

A 16H25, heure officielle du décès d'Hugo Chavez, des coups de canon ont été tirés de la Caserne de la Montagne, où repose la dépouille de l'ex-commandant parachutiste. Une cérémonie religieuse s'est ensuite déroulée sur ce site devenu un lieu de pèlerinage pour les partisans de l'ancien président.

«Le legs qu'il nous laisse est assurément intouchable, inoubliable, et cette oeuvre sera éternelle», a déclaré M. Morales dans une brève intervention.

Dans plusieurs quartiers de Caracas, les habitants ont lancé des feux d'artifice en l'honneur du défunt, dont la forte popularité ne s'est jamais démentie, en particulier auprès des plus modestes. A l'est de la ville, les partisans de l'opposition ont dans le même temps tapé sur des casseroles en signe de mécontentement face au gouvernement.

La chaîne de télévision latino-américaine Telesur, dont le siège est au Venezuela, devait diffuser en avant-première mondiale dans la soirée le documentaire Mi Amigo Hugo (Mon ami Hugo) réalisé par le célèbre réalisateur américain Oliver Stone.

Mercredi, des groupes de jeunes ont édifié de nouvelles barricades qui ont perturbé la circulation dans l'est de la capitale.

Première cible de la grogne, le président Maduro, élu de justesse en avril dernier, n'a de cesse de dénoncer une «tentative de coup d'État» fomentée notamment avec l'aide des États-Unis. La semaine dernière, il a concédé l'ouverture d'un dialogue national, mais opposants et étudiants n'y ont pas participé.

Face à cette contestation sans précédent depuis son élection, l'ex-conducteur d'autobus et syndicaliste veille à entretenir la légitimité héritée de son mentor en prônant la continuité de sa «révolution bolivarienne». Il encourage également le culte fervent que lui voue une bonne partie des 30 millions de Vénézuéliens.

Pour les analystes, le gouvernement de M. Maduro est encore loin d'être fragilisé, le Parti socialiste uni du Venezuela (PSUV) et l'armée apparaissant pour l'heure soudés derrière leur chef de file.

Photo George CASTELLANO, AFP