Le maire de Bogota Gustavo Petro a été destitué et privé de fonctions publiques pendant 15 ans pour une passation de marché jugée irrégulière, suscitant la colère des partisans de cet ex-guerillero devenu un symbole de la gauche en Colombie.

Cette décision a été lue devant la presse par le procureur général Alejandro Ordoñez, qui a estimé que M. Petro avait nui au patrimoine public et aux principes constitutionnels de libre entreprise et de concurrence en retirant la concession de la collecte d'ordures dans la capitale à des entreprises privées au profit de la Compagnie de l'aqueduc (publique).

Peu après cette annonce, le maire élu jusqu'en 2016 sous la bannière d'un parti de gauche, qui compte faire appel contre cette destitution, a appelé sur son compte Twitter à une «mobilisation populaire pacifique» pour défendre sa cause.

«Je reste le maire de Bogota jusqu'à ce qu'il y ait une décision ferme qui signifie le contraire», a déclaré dans la soirée M. Petro, qui a dénoncé un «coup d'État» et assuré qu'il agirait toujours en «faveur des plus modestes».

Manifestation de soutien

Des centaines de partisans du maire se sont réunis sur la place Bolivar, la principale de la capitale, non loin de laquelle se trouve, outre la mairie, le Palais présidentiel, le tribunal de Bogota, ainsi que les principaux ministères.

Depuis le balcon de la mairie, M. Petro, accompagné de sa famille, a salué les manifestants. «Nous gardons la tête haute, nous gouvernons avec zéro corruption, nous démantelons les mafias, nous obtenons des avancées sociales, nous n'avons rien à regretter», leur a-t-il lancé.

Selon la loi, M. Petro peut faire appel devant le procureur ou saisir le Conseil d'État pour tenter de faire annuler la décision. Aucune information n'a été fournie par les autorités sur les modalités de l'intérim ou du remplacement du maire.

Ancien militant au sein du M-19 (Mouvement du 19 avril), une guérilla nationaliste fondée en 1970 pour dénoncer une fraude électorale, M. Petro avait été arrêté et condamné en 1985 à 18 mois de prison pour port d'armes illégal.

En octobre, le Conseil d'État colombien avait rejeté une procédure de destitution visant le maire en raison de cette condamnation. Pour sa défense, M. Petro avait fait valoir que les faits commis à l'époque avaient été amnistiés après la dissolution du M-19 en 1990.

Le maire était également la cible d'une pétition officielle lancée par l'opposition qui avait réuni suffisamment de signatures pour convoquer un référendum posant la question de son maintien. Le tribunal électoral avait jugé cette procédure valide mais n'avait pas encore fixé la date du scrutin.

Après avoir été guérillero, cet économiste de 53 ans s'était reconverti avec succès dans la politique comme sénateur, puis comme maire de Bogota, une élection considérée comme un symbole dans ce pays rongé par près d'un demi-siècle de conflit armé avec des guérillas d'extrême-gauche.