La Cour suprême du Brésil a décrété l'incarcération de plusieurs proches collaborateurs de l'ancien président Lula (2003-2010) dans le cadre du «Mensalao», le plus vaste procès anticorruption jamais organisé dans le pays.

Mercredi soir, la Cour a imposé l'exécution immédiate des peines de 16 des 25 condamnés du «Mensalao». Tous ont été condamnés fin 2012.

C'est le cas des figures de proue du Parti des travailleurs (PT-gauche, au pouvoir) : José Dirceu, chef de cabinet de l'ex-président Luiz Inacio Lula da Silva, José Genoino, l'ancien président du PT et ex-guérillero, et Delubio Soares, ex-trésorier du PT, a indiqué la Cour à l'AFP.

L'ancien bras droit de Lula, M. Dirceu, est accusé d'avoir été le chef d'orchestre d'un vaste système d'achats de votes de députés par le PT lors du premier mandat de Lula. Le caractère périodique du versement des pots-de-vin aux élus a valu à ce procès l'appellation de «Mensalao» (mensualité).

Mais, comme tous trois ont été condamnés à moins de huit ans de détention, pour corruption active, ils bénéficieront d'un régime de semi-liberté. Celui-ci leur permettra de travailler à l'extérieur de la prison, où ils devront cependant passer la nuit.

M. Dirceu, par exemple, a été condamné à 7 ans et 11 mois de prison pour corruption.

Au Brésil, «on a des milliers de détenus pour des petites quantités de marijuana et très peu de détenus pour de grosses affaires. Pour être incarcéré au Brésil, il faut être très pauvre et très mal défendu. Le système est sélectif, presque de castes», a déploré à l'audience l'un des magistrats de la Cour suprême, Luis Roberto Barroso.

L'avocat de M. Dirceu, Me José Luiz de Oliveira Lima, a affirmé jeudi matin qu'il allait discuter avec son client de la façon dont il va se livrer à la police.

Un autre procès en 2014 pour association de malfaiteurs

Ces cadres du PT et certains autres condamnés font également l'objet d'un autre procès pour «association de malfaiteurs», à l'issue duquel leur peine de prison pourrait s'aggraver.

Le 18 septembre, la Cour suprême avait accepté que 12 entrepreneurs, banquiers et hommes politiques - dont Dirceu, Genoino et Soares - puissent être rejugés pour ce délit en vertu d'une règle selon laquelle celui qui a reçu au moins quatre voix contre sa condamnation peut faire appel du jugement.

Ce nouveau procès aura lieu en 2014, année d'élection présidentielle où Dilma Rousseff, héritière politique de Lula, briguera une réélection.

Dans une interview publiée en septembre, M. Dirceu s'était dit victime de secteurs politiques du pays qui, selon lui, «sont jaloux» de l'ancien président Lula et du gouvernement de Mme Rousseff.

Si la Cour suprême maintient leur peine, ils passeront de la semi-liberté à l'incarcération pure et simple. M. Dirceu, par exemple, a été condamné à deux ans et 11 mois de prison pour association de malfaiteurs.

Le premier dont l'incarcération a été décrétée mercredi soir a été l'ancien directeur de la banque publique Banco do Brasil, Henrique Pizzolatto, condamné fin 2012 à 12 ans et sept mois de détention pour détournement de fonds publics et blanchiment d'argent.

Il fait partie des 13 accusés (du total de 25) qui n'ont pas eu le droit de faire appel.

La Cour a également confirmé la condamnation de l'ex-député Roberto Jefferson (PTB, opposition), qui avait dénoncé le vaste système de corruption dont lui-même faisait partie et qui a été condamné à 7 ans et 14 jours de détention pour corruption active.

Le scandale du «Mensalao» avait failli coûter sa réélection à Lula en 2006, même s'il avait personnellement été mis hors de cause par la justice. Il a quitté le pouvoir avec une popularité record de 80 %.