Destructions, pillages et heurts avec la police ont marqué mercredi la fin d'une grande manifestation à Belo Horizonte en marge de la demi-finale Brésil-Uruguay (2-1) de la Coupe des Confédérations, alors que Brasilia adoptait des mesures anti-corruption pour répondre à la clameur des rues.

Les manifestants qui réclamaient entre autres des peines contre la corruption ont marqué des points: le Sénat a approuvé en soirée un projet de loi qui criminalise la corruption. Dans la matinée la Cour suprême avait décrété l'incarcération immédiate d'un député condamné pour malversations, une première en 25 ans.

Le syndicats ont réitéré leur appel lancé la veille à des grèves et manifestations le 11 juillet après avoir été reçus à Brasilia par la présidente Dilma Rousseff.

Quelque 40 000 manifestants ont marché pacifiquement à Belo Horizonte (5,5 millions d'habitants) jusqu'au moment où un groupe de manifestants a tenté de forcer le périmètre de sécurité dressé à deux kilomètres du stade Mineirao où la Seleçao a obtenu son billet pour la finale de la Coupe dimanche à Rio de Janeiro.

La police a alors commencé à tirer des gaz lacrymogènes pour répondre à des jets de pierres.

«Les manifestants ont détruit au moins deux concessionnaires automobiles en y mettant le feu. 24 personnes ont été interpellées», a déclaré une porte-parole de la police à l'AFP.

Le détonateur des manifestations a été une hausse du prix des transports en commun, révoquée depuis. Les revendications se sont étendues à une amélioration de services publics indigents et visent désormais tous les maux du pays.

«Sac à bonté»

Après deux semaines de protestations massives qui ébranlent le grand pays émergent d'Amérique latine, les protestataires commencent à remporter des victoires concrètes.

«Le Parlement ouvre son sac à bontés», titrait mercredi le quotidien populaire O Dia.

Le Sénat brésilien a approuvé mercredi soir un projet de loi qui qualifie la corruption de «crime barbare» au même titre qu'un meurtre. La mesure doit encore être votée à la Chambre des députés.

Mercredi matin, la Cour suprême fédérale a fait sensation en ordonnant l'incarcération immédiate d'un député condamné en 2010 à 13 ans de prison pour malversations, une première depuis la promulgation de la Constitution démocratique du Brésil en 1988.

La législation pénale brésilienne protège fortement les élus du pays qui ne peuvent être jugés par des tribunaux ordinaires tant qu'ils exercent leurs mandats. De multiples voies de recours et la lourde bureaucratie du pays retardent considérablement les jugements définitifs.

Dans la nuit de mardi à mercredi, les députés ont enterré en un temps record et à une majorité écrasante un projet très critiqué par la rue visant à retirer leurs pouvoirs d'enquête aux parquets, régulièrement en pointe dans les affaires de corruption.

Ils ont aussi approuvé que 75% de la manne pétrolière aille à l'éducation et 25% à la santé. Le projet de loi doit passer maintenant au sénat. La présidente Dilma Rousseff pourra mettre son véto à certains points car elle souhaitait que 100% des royalties du pétrole soient destinées à l'éducation.

A Brasilia, 4.000 manifestants ont protesté au coeur de la capitale pour exiger l'abandon du projet de loi controversé dit de la «cura gay» (remède à l'homosexualité) qui prévoit des mesures de soutien psychologique pour convertir les homosexuels à l'hétérosexualité.

Ce projet a été approuvé par la Commission des droits et l'homme et des minorités présidée par le très controversé député et pasteur évangélique Marcos Feliciano.

Sur le front politique, la présidente va formellement demander au parlement de convoquer un référendum pour soumettre au peuple brésilien un projet de réforme en cours de discussion à Brasilia qui pourrait affecter la loi sur les partis et le mode de scrutin.

Elle avait subi un revers mardi en renonçant à son projet de confier cette réforme à une assemblée constituante, vivement critiquée par les parlementaires, jusqu'au sein de sa majorité, et des juristes.