La représentation de l'ONU en Colombie a réaffirmé vendredi sa «préoccupation» concernant une réforme controversée de la justice militaire, perçue par ses détracteurs comme synonyme d'impunité pour les violations des droits de l'homme commises par l'armée.

La représentation de l'ONU en Colombie a réaffirmé vendredi sa «préoccupation» concernant une réforme controversée de la justice militaire, perçue par ses détracteurs comme synonyme d'impunité pour les violations des droits de l'homme commises par l'armée. La loi, dont le principe avait été approuvé en décembre dernier par le Congrès, doit être définitivement validée lundi lors d'un vote définitif.

«Notre bureau conserve une profonde préoccupation concernant une série de faits liés à ce projet», a indiqué la représentation en Colombie du Haut Commissariat aux droits de l'homme de l'ONU.

La loi prévoit notamment la création d'un tribunal spécial chargé de décider si une affaire relève de la juridiction civile ou militaire. Elle vise à offrir une certaine sécurité aux militaires qui, selon des responsables de l'armée, sont parfois réticents à mener des actions offensives, de crainte d'être ensuite traînés devant la justice civile.

Le thème de la justice militaire a toujours été très sensible en Colombie, où des membres de l'armée ont été mis en cause pour des crimes, en particulier sous le mandat de l'ancien président Alvaro Uribe (2002-2010), dans le cadre de la lutte contre les guérillas communistes qui dure depuis près d'un siècle.

L'un des cas les plus connus est celui des «faux positifs», des civils abattus par des soldats, puis présentés comme des guérilleros tués au combat, notamment des combattants marxistes des Farc (Forces armées révolutionnaires de Colombie), principale rébellion qui a ouvert depuis six mois des négociations de paix avec les autorités.

«Les faux positifs, qui font en ce moment l'objet d'enquêtes au pénal, peuvent être transmis pour les investigations et le jugement à des autorités dépendant du ministère de la Défense», déplore la représentation de l'ONU. Une inquiétude partagée par plusieurs associations comme Human Rights Watch et Amnesty International.

Quelque 1295 cas de «faux positifs» sont actuellement en cours d'examen par le Parquet, selon les estimations d'organisations de défense des droits de l'homme.

Pour l'ONU, la réforme apparaît «totalement non nécessaire même si le système antérieur n'était pas parfait».

De son côté, le gouvernement, à l'initiative de cette loi, insiste sur le fait qu'elle exclut du champ de la justice militaire les crimes les plus graves comme les génocides, les disparitions forcées, les viols, les exécutions extra-judiciaires et les tortures.