L'ancien président guatémaltèque Alfonso Portillo a plaidé mardi non coupable à New York d'avoir détourné des millions de dollars d'argent public au Guatemala, via des banques américaines.

Extradé vendredi de son pays, M. Portillo a simplement répondu «oui» d'une voix quasi inaudible, quand le juge fédéral Robert Patterson lui a demandé s'il plaidait non coupable du détournement de «dizaines de millions de dollars», selon un journaliste de l'AFP présent à l'audience, qui a duré environ 30 minutes.

Vêtu d'une veste sombre, chemise blanche et cravatte violette, M. Portillo, 61 ans, très calme, était assisté de cinq avocats.

Il est détenu au Centre correctionnel métropolitain, la prison fédérale de Manhattan.

«Après avoir combattu son extradition pendant trois ans, Alfonso Portillo est finalement arrivé aux Etats-Unis pour y répondre du détournement supposé de millions de dollars destiné au peuple du Guatemala, qu'il a blanchis via des banques américaines», s'était réjoui mardi matin le procureur fédéral de Manhattan Preet Bharara.

M. Portillo, un conservateur au pouvoir de 2000 à 2004, avait été accusé en janvier 2010 par un tribunal de New York d'avoir détourné des dizaines de millions de dollars de fonds publics, dont une partie aurait transité par des banques américaines et européennes (France, Suisse, Luxembourg, Angleterre). Ces fonds comprenaient notamment 1,5 million de dollars, offerts par le gouvernement de Taïwan en 2000, pour acheter des livres pour des bibliothèques scolaires guatémaltèques.

L'argent avait été déposé sur un compte en Floride, avant de repartir vers la Banco Bilbao Vizcaya Argentaria (BBVA) à Paris, sur des comptes au nom de la femme et la fille de Portillo, avant d'être blanchi via la Suisse, l'Angleterre et le Luxembourg, selon l'acte d'inculpation.

En 2001, Portillo avait encore détourné avec deux complices l'équivalent de 3,9 millions de dollars du département guatémaltèque de la Défense, déposés dans une banque publique, le Crédit hypothécaire national (CHN) dont il avait peu avant nommé le président, selon le même document. L'argent avait là encore été blanchi via une banque de Miami.

Entre 2000 et 2003, M. Portillo aurait également utilisé les fonds des réserves de cette banque à des fins personnelles, pour acheter notamment des voitures et des montres de luxe, et renflouer deux autres banques qui appartenaient à l'un de ses soutiens politiques.

Accusé de complot de blanchiment, il risque jusqu'à 20 ans de prison et 500 000 dollars d'amende.

M. Portillo est le premier ancien chef d'État latino-américain à être extradé de son pays vers les États-Unis.

Il avait déposé plusieurs recours contre son extradition, à laquelle l'ex-président libéral Alvaro Colom (2008-2012) avait donné son feu vert en novembre 2011.