Le régime de Hugo Chavez a appelé les Vénézuéliens à manifester à Caracas jeudi, jour prévu pour la prestation de serment du président, dont un retour de dernière minute n'a pas été écarté par le gouvernement près de quatre semaines après son opération d'un cancer à Cuba.

Lundi soir, le ministre de l'Information Ernesto Villegas a annoncé à la télévision nationale que le président, hospitalisé depuis le 11 décembre à La Havane, se trouve dans une «situation (médicale) stable» et qu'il «assimile son traitement», sans plus de précisions. Le dernier communiqué du gouvernement, datant du jeudi 3 janvier, indiquait qu'il souffrait d'une «insuffisance respiratoire» consécutive à une «grave infection pulmonaire».

Un peu plus tôt, le président de l'Assemblée nationale, Diosdado Cabello, numéro trois du régime, a appelé à une «grande manifestation» jeudi en soutien à Hugo Chavez «face au palais (présidentiel) de Miraflores» en présence de «nombreux chefs d'État de pays amis».

Interrogé par la presse pour savoir si M. Chavez pourrait être lui-même présent, M. Cabello a répondu: «Nous n'écartons absolument rien», au côté du vice-président et dauphin désigné du président, Nicolas Maduro.

Dans le même temps, le gouvernement fait de plus en plus l'objet de critiques sur ses intentions en cas d'absence de Hugo Chavez ce jeudi.

L'Église vénézuélienne a jugé lundi «moralement inacceptable» d'enfreindre la Constitution pour «réaliser un objectif politique», prenant ainsi position en faveur de l'opposition dans cette polémique.

Si on s'éloigne de la Constitution, «on s'éloigne aussi de l'institution et on tombe dans la lutte pour des parts de pouvoir, dans la violence, dans l'anarchie et l'ingouvernabilité», a averti dans un discours Mgr Diego Padron, président de la Commission épiscopale vénézuélienne (CEV).

M. Cabello a ironisé sur ces déclarations, «imaginant» qu'elles s'adressaient à l'opposition.

Dimanche, le parti du principal opposant, Henrique Capriles, a appelé ses partisans à descendre dans la rue pour protester contre les intentions du gouvernement. Cette formation, Primero Justicia, n'a toutefois pas précisé de date ni de lieu pour une manifestation.

Nicolas Maduro estime que le président, réélu le 7 octobre, pourra prêter serment dès que sa santé le permettra considérant cette cérémonie comme «une formalité». Il assure que M. Chavez, qui lui a délégué une partie de ses pouvoirs en son absence, continuera à être président même s'il ne prête pas serment jeudi.

De son côté, l'opposition exige que le président du parlement assume par intérim les fonctions de chef de l'État à partir du 10 janvier si Hugo Chavez, au pouvoir depuis 1999, n'est pas en mesure de prêter serment.

La coalition réunissant la plupart des opposants, la Table de l'unité démocratique (MUD), était réunie depuis dimanche pour s'accorder sur la marche à suivre dans les jours à venir.

En vertu de la Constitution vénézuélienne, le chef de l'État élu doit prêter serment devant l'Assemblée nationale au cours d'une cérémonie qui doit se dérouler au Venezuela et ne peut être reportée.

Cependant, les barons du régime s'appuient sur le fait que la loi fondamentale dispose également que s'il ne peut prêter serment devant l'Assemblée, le président doit le faire devant le Tribunal suprême de justice. Et dans ce cas, aucun délai n'est mentionné.

A Brasilia, Marco Aurelio Garcia, conseiller spécial aux affaires internationales de la présidente Dilma Rousseff, qui a été envoyé à La Havane la semaine dernière, a déclaré à la presse que l'état du président vénézuélien était «grave».

Il a ajouté avoir rencontré à cette occasion Nicolas Maduro, qui lui a dit qu'au cas où M. Chavez ne pourrait être présent à Caracas jeudi, il existe une disposition constitutionnelle qui prévoit un délai de 90 jours, renouvelable pour 90 jours, dans le cas d'un «défaut temporaire».

Le président Chavez est invisible depuis son départ le 10 décembre à Cuba pour y être opéré une quatrième fois de son cancer dans la zone pelvienne diagnostiqué en juin 2011. La nature et la localisation exacte de ce cancer sont tenues secrètes par les autorités.

Dans son discours, le président de la Commission épiscopale a déploré un manque d'informations précises de la population sur l'évolution de l'état de santé du président. «La population est troublée, et une bonne partie d'entre elle est irritée», a-t-il dit.

Parmi les «nombreux chefs d'État de pays amis» attendus jeudi par le gouvernement, seul le président uruguayen José Mujica a confirmé un déplacement officiel à Caracas. La présidente argentine Cristina Kirchner a prévu, pour sa part, de se rendre jeudi à La Havane.