Le président vénézuélien Hugo Chavez devait se rendre dimanche à Cuba pour y subir une opération après une nouvelle récidive de son cancer, et il a pour la première fois fait allusion à son possible retrait du pouvoir en désignant son vice-président comme éventuel successeur.

Le ministre de la Communication Ernesto Villegas a indiqué à la presse qu'il ne disposait d'aucune information sur l'heure du départ du président Chavez, qui a reçu dimanche le feu vert formel des députés pour pouvoir quitter le pays.

M. Villegas n'a pas non plus indiqué si M. Chavez avait déjà quitté le Venezuela dimanche soir.

Dans un discours plein d'émotion, Hugo Chavez, âgé de 58 ans et au pouvoir depuis 1999, a admis que son cancer l'avait une nouvelle fois rattrapé et reconnu implicitement que, cette fois-ci, il pourrait ne pas revenir au pouvoir.

M. Chavez, réélu haut la main le 7 octobre et qui doit en principe accéder officiellement à son troisième mandat le 10 janvier, a désigné son vice-président Nicolas Maduro non seulement pour assurer l'intérim de la présidence s'il devait être déclaré «inapte» à assumer ses fonctions, mais aussi pour lui succéder s'il lui était impossible de reprendre son poste.

Alors que sa disparition de la scène publique alimentait depuis des semaines les rumeurs sur son état de santé, le dirigeant vénézuélien a annoncé lui-même la nouvelle samedi soir à la radio-télévision.

«A cause de quelques autres symptômes, nous avons décidé avec l'équipe médicale d'avancer les examens (...) et, malheureusement, dans ce bilan exhaustif, est apparue la présence de quelques cellules malignes récentes», a déclaré M. Chavez qui s'était rendu à La Havane pour ces examens.

«Il est absolument indispensable que je subisse une nouvelle intervention chirurgicale et elle doit avoir lieu dans les prochains jours», a-t-il ajouté.

Ses médecins avaient même préconisé qu'elle ait lieu dès vendredi, puisqu'il était déjà sur place, mais il a refusé, préférant revenir au Venezuela pour demander au Parlement l'autorisation de quitter le pays pendant plus de cinq jours.

Cela a été chose faite dimanche, les députés ayant donné leur feu vert à l'unanimité, avec les voix de l'opposition qui a cependant demandé «la vérité» sur l'état de santé du chef de l'État.

«Commandant, partez tranquille à Cuba. Nous vous attendons», a déclaré après le vote le président de l'Assemblée nationale, Diosdado Cabello.

La présidente argentine Cristina Kirchner a également souhaité un bon rétablissement à Hugo Chavez, lors d'un discours public sur la place de Mai à Buenos Aires.

«Depuis cette place, il est nécessaire d'en appeler à Dieu pour un ami et compagnon cher qui a aidé l'Argentine quand personne d'autre ne l'aidait, qui lui a tendu une main généreuse, afin qu'il redonne la santé à Hugo Chavez», a lancé Mme Kirchner.

M. Chavez a admis qu'il pourrait ne pas revenir au pouvoir, pour la première fois depuis qu'il a commencé en 2011 à se battre contre sa maladie. L'opération à venir est la quatrième de son cancer qui a été traité comme un secret d'Etat par les autorités de Caracas et dont on ignore le caractère exact.

«Si quelque chose arrivait, qui me fasse déclarer inapte de quelque manière, (le vice-président et ministre des Affaires étrangères) Nicolas Maduro est en situation d'assumer, comme l'impose la Constitution, la période» d'intérim avant la convocation de nouvelles élections.

S'il était dans l'incapacité de commencer son nouveau mandat le 10 janvier, la Constitution prévoit de nouvelles élections dans les 30 jours et un interim assuré par le président du Parlement.

Si M. Chavez était présent le 10 janvier mais devait quitter son poste dans les quatre premières années de son mandat, alors de nouvelles élections seraient également convoquées, mais c'est le vice-président qui assurerait l'intérim.

Et à ces nouvelles élections, «vous élirez Maduro président de la République, je vous le demande du fond du coeur», a déclaré Hugo Chavez, laissant ainsi non seulement aux électeurs mais aussi à son propre parti une consigne claire pour sa succession.

Le chef de l'opposition et candidat présidentiel battu en octobre, Henrique Capriles, a critiqué dimanche cette démarche en affirmant: «Qu'il soit bien clair qu'au Venezuela il n'y a pas de succession. Nous ne sommes pas à Cuba et nous ne sommes pas une monarchie où il y a un roi et puis l'accession au trône de celui qu'il a désigné. Non, ici au Venezuela (...) c'est toujours le peuple qui a le dernier mot».

M. Maduro, un ancien chauffeur d'autobus de 50 ans, qui a commencé sa carrière politique en tant que syndicaliste, représente l'aile modérée de l'entourage de M. Chavez, face au président de l'Assemblée nationale, Diosdado Cabello, beaucoup plus radical.

Hugo Chavez a déjà subi trois opérations à Cuba après la découverte d'une tumeur cancéreuse dans la zone pelvienne en juin 2011. Il s'était à deux reprises déclaré totalement guéri.

Après avoir été réélu le 7 octobre, pour la troisième fois après 2000 et 2006, le chef d'État, chauve, à la silhouette alourdie, s'est éclipsé de la vie publique en raison de ses problèmes de santé.

Sur la place Bolivar à Caracas, des centaines de ses partisans se sont rassemblés dimanche pendant toute la journée en scandant: «Il vivra, il vivra, le commandant vivra!» De semblables rassemblements ont eu lieu ailleurs dans le pays.





Photo: AFP