La Cour suprême du Brésil a reconnu mardi coupables de «corruption active» trois des hommes les plus proches de l'ex-président Lula, dans le cadre d'un procès fleuve portant sur l'achat de députés au Parlement entre 2003 et 2005.

La majorité des dix juges a reconnu coupables l'ancien chef de cabinet de l'ex-président Lula, José Dirceu, l'ancien patron du Parti des travailleurs (PT-gauche) José Genoino, et l'ex-trésorier du PT, Delubio Soares, d'avoir orchestré ce vaste système de versement de pots-de-vin sous le premier mandat de Luiz Inacio Lula da Silva (2003-2010).

Ces déclarations de culpabilité ont été annoncées entre les deux tours des élections municipales au Brésil.

Le PT, toujours au pouvoir avec l'actuelle présidente Dilma Rousseff, n'a pas véritablement souffert de l'onde médiatique de ce procès au premier tour dimanche. S'il éprouve des difficultés dans certaines grandes villes, il a progressé de 14% par rapport à 2008, alors que la popularité de Mme Rousseff est au zénith (77%).

M. Dirceu, 66 ans, ex-guérillero et ancien bras droit de Lula, le principal accusé politique de ce procès entamé début août, est considéré par le rapporteur du procès comme le «chef» de ce système.

«Les faits permettent de dire que Dirceu a commandé les actions», avait déclaré le juge, Joaquim Barbosa, il y a une semaine.

Dirceu avait été obligé de démissionner en 2005 quand le scandale de corruption avait éclaté, mais il a toujours nié avoir versé des pots-de-vin aux parlementaires et se proclame innocent.

«Perception d'impunité»

José Genoino, 66 ans, -- un ancien guérillero également, fondateur du PT avec Lula et Dirceu en 1980--, et Delubio Soares sont les deux autres accusés politiques de ce procès entamé début août qui fait quotidiennement la Une des médias au Brésil.

Les juges ont statué que tous trois distribuaient de l'argent à des parlementaires par le biais du publicitaire Marcos Valerio dans le but de recueillir illicitement le soutien de partis politiques alliés pour former la coalition du gouvernement fédéral.

Ce publicitaire a été lui aussi reconnu coupable de corruption mardi.

«La condamnation de Dirceu et de Genoino a un effet symbolique très fort au Brésil, où, comme dans d'autres jeunes démocraties, il existe une perception d'impunité, surtout par rapport aux hommes politiques», a déclaré mardi à l'AFP l'analyste politique du consultant Tendencias, Rafael Cortez.

L'achat de vote au parlement est une vieille pratique au Brésil.

Du total des 37 accusés, hommes politiques, hommes d'affaires et banquiers, une trentaine ont déjà été reconnus coupables.

Les premières annonces de culpabilité étaient tombées le 30 août avec celle notamment d'un ex-président de la Chambre des députés, Joao Paulo Cunha, du PT lui-aussi.

En revanche, les magistrats avaient relaxé faute de preuves Luiz Gushiken, un proche de Lula et ancien ministre de la Communication.

Les condamnations sont annoncées jour après jour mais les peines ne seront connues qu'à l'issue des audiences, dans plusieurs semaines.

L'affaire dite du «mensalao» avait failli coûter sa réélection à Lula en 2006, même s'il a été mis hors de cause par la justice.

Lorsque le scandale a éclaté, il avait déclaré se sentir trahi et s'était excusé publiquement au nom de son parti.

Vendredi, Lula a accusé l'opposition de chercher à exploiter ce procès pour corruption, le premier de cette envergure jamais organisé au Brésil, dans le contexte électoral des municipales.