La guérilla des Farc a confirmé vouloir participer «sans rancoeur ni arrogance» à un processus de paix historique pour mettre fin à près d'un demi-siècle de conflit en Colombie, dans un message de son chef suprême diffusé lundi.

«Nous arrivons à la table de dialogue sans rancoeur, ni arrogance», a affirmé Rodrigo Londoño, le numéro un des Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc), dans une vidéo diffusée sur internet.

Il s'agit de la première déclaration des Farc depuis l'annonce il y a une semaine par le président Juan Manuel Santos de l'existence de «discussions exploratoires» avec la rébellion marxiste, en lutte depuis près d'un demi-siècle.

«Nous avons juré de vaincre et nous vaincrons», poursuit de manière laconique le numéro un des Farc, connu sous le nom de guerre de «Timoleon Jimenez» alias «Timochenko».

Les contacts, noués entre les autorités colombiennes et la principale rébellion du pays, la plus ancienne d'Amérique latine, visent à ouvrir un dialogue, dans l'espoir de mettre fin à 48 ans de conflit.

Ce cycle de négociations devrait s'ouvrir en octobre à l'étranger, en Norvège puis à Cuba, sous les auspices du Venezuela et du Chili, selon des informations parues dans la presse colombienne.

Le même jour, sans faire référence au message des Farc, le président Santos, à mi-mandat avant les élections en 2014, a rappelé que «toutes les guerres finissent par un accord, un dialogue», lors de son programme radiophonique.

La déclaration de «Timochenko» est «un pas supplémentaire sur la route qui a été fixée» avec le gouvernement, a expliqué à l'AFP le politologue colombien Fernando Giraldo.

«C'est un message politique qui semble montrer une intention de faire la paix. Les Farc ont subi des coups très durs et cette déclaration reflète une bonne attitude», a-t-il ajouté, tout en estimant que «durant les négociations peuvent surgir de nombreux problèmes».

«Parler avec le bourgeois»

Fondée en 1964, la guérilla des Farc, une insurrection d'origine paysanne, compte encore 9200 combattants, selon les autorités, repliés dans les régions rurales après une série de revers qui ont fait fondre ses troupes de moitié en 10 ans.

Le gouvernement aurait initié dans le plus grand secret ce rapprochement depuis le mois de février à La Havane, sous les auspices des chefs d'État cubain Raul Castro et vénézuélien Hugo Chavez.

Une chanson accompagne la vidéo de «Timochenko» dans laquelle des guérilleros lancent sur un air de rap qu'ils «vont à La Havane pour discuter avec ceux qui les accusaient de mentir sur la paix».

«Je vais à La Havane, cette fois pour parler avec le bourgeois qui nous cherchait, mais n'a pu nous vaincre», chantent les rebelles en uniforme, en allusion à M. Santos.

Depuis l'annonce de ces premiers contacts inédits, le président colombien n'a pas encore officialisé la signature de l'accord avec les Farc qui doit déboucher sur l'ouverture d'une table de dialogue.

Les négociations devront aborder plusieurs points sensibles comme la question agraire, à l'origine de la naissance des Farc, le trafic de drogue, mais aussi l'instauration d'un cessez-le-feu et la réinsertion politique des guérilleros, un thème explosif.

Selon un sondage publié vendredi dernier, une majorité de Colombiens (60%) se dit favorable à l'ouverture d'un processus de paix, mais la moitié d'entre eux (49%) refuse de «sacrifier une partie de la justice».

Depuis 30 ans, les trois précédentes tentatives de négociations avec les Farc se sont soldées par des échecs. La dernière remonte à 2002 quand le gouvernement avait suspendu la démilitarisation de la région du Caguan, dans le sud, affirmant que la guérilla en avait profité pour se renforcer.

Afin d'éviter de «répéter les erreurs du passé», M. Santos a plusieurs fois martelé que l'action de l'armée se poursuivrait. Une consigne vérifiée lundi sur le terrain où sept guérilleros ont été abattus par l'armée.