Les Argentins ont commencé à voter dimanche pour élire leur président, alors que Cristina Kirchner, qui brigue un deuxième mandat de quatre ans, semblait devoir l'emporter haut la main grâce à une croissance économique largement plébiscitée.

Tous les sondages donnent à Mme Kirchner, 58 ans, candidate du Front pour la Victoire (péronisme de centre-gauche) entre 51% et 55,4% des voix, contre à peine 12,4% à 15,6% à son principal rival, le socialiste Hermes Binner.

Si ces chiffres se confirment, il est possible qu'on assiste au plus grand écart de l'Histoire du pays entre le vainqueur et son principal opposant.

Les 12 526 bureaux de vote du pays ont ouvert leurs portes à 08H00 (11H00 GMT), protégés par un important dispositif de sécurité. Le scrutin doit être clos à 18H00 (21H00 GMT), les premiers résultats officiels ne pouvant être diffusés que trois heures après.

Pour être élue au premier tour, Mme Kirchner doit obtenir soit plus de 45% des voix, soit plus de 40% avec une avance de plus de 10 points sur son principal rival.

Partie se reposer auprès de ses enfants à Rio Gallegos (2.600 km au sud de Buenos Aires), ville natale de son mari et prédécesseur Nestor Kirchner (2003-2007), décédé d'une crise cardiaque il y a un an, Mme Kirchner en a profité pour visiter le chantier de son mausolée.

Elle doit être de retour à Buenos Aires dimanche en fin d'après-midi pour suivre les résultats du vote, alors que quelque 28,8 millions d'Argentins se rendent aux urnes.

Les classes populaires, électorat traditionnel du péronisme, sont acquises, mais aussi une bonne partie des classes moyennes, voir des cadres supérieurs qui font le pari de la stabilité économique.

«Les gens disent: si on ne vote pas Cristina, on vote pour qui ?», dit l'analyste Jorge Giacobbe, de l'institut du même nom. «Personne, en face, n'a été capable de les séduire».

Ricardo Alfonsin (radical), fils de l'ancien président Raul Alfonsin (1983-1989), n'arriverait que troisième, juste devant le péroniste dissident Alberto Rodriguez Saa.

Dès les primaires du 14 août, que Mme Kirchner a emportées avec plus de 50% des voix, la différence est apparue insurmontable pour ses rivaux.

«La croissance économique (8% en moyenne depuis 2003, à l'exception de 2009) est arrivée chez les gens, ils la sentent», explique Analia del Franco, de l'institut Analogias.

La consommation est en plein boom, avec 4% d'augmentation par an, et le taux de chômage dépasse à peine 7%.

L'Argentine bénéficie de l'envolée des prix des matières premières, notamment du soja, dont elle est le troisième exportateur au monde.

Surtout, Mme Kirchner semble avoir fait la paix avec les classes moyennes, que son mari avait effrayées lors du conflit avec les agriculteurs, en 2008, refusant jusqu'au bout toute négociation.

La présidente apparaît aujourd'hui comme quelqu'un de raisonnable.

«Elle a entièrement changé son rapport aux classes moyennes», souligne le politologue Enrique Zuleta Puceiro. «Elle est aujourd'hui progressiste, mais modérée: c'est pourquoi on ne vote pas pour elle que dans les zones déshéritées».

Une réunion de Mme Kirchner avec les dirigeants agricoles peu avant le scrutin, impensable il y a un an, a été très appréciée. «La présidente a fait un grand geste», a dit l'un d'eux, Carlos Garetto.

La mort de son mari lui a permis de donner d'elle une tout autre image, moins autoritaire et plus consensuelle.