Des Casques bleus népalais ont bien importé en Haïti la souche de choléra responsable de l'épidémie qui a fait plus de 5500 morts dans le pays, conclut une étude épidémiologique publiée par les Centres américains de contrôle et de prévention des maladies (CDC).

Cette recherche, menée par un groupe de médecins français, paraît dans le journal Emerging Infectious Diseases des CDC daté de juillet.

Elle est la première, hors d'Haïti, à établir clairement un lien direct entre l'arrivée de ce bataillon de l'ONU près de la petite ville de Mirebalais et l'épidémie qui a éclaté fin 2010.

Ce lien, qui avait été suspecté, a provoqué des émeutes anti-onusiennes sanglantes dans le pays, le plus pauvre du continent américain.

«Il y a eu une parfaite corrélation dans le temps et les lieux entre l'arrivée du bataillon népalais venant d'une région (au Népal) où sévissait une épidémie de choléra et l'apparition des premiers cas, à Meille, quelques jours plus tard», écrivent les auteurs de ce rapport.

«L'isolement de Meille, dans la partie centrale d'Haïti, et l'absence d'information faisant état de la venue d'autres étrangers dans la région» rend improbable l'importation d'une souche de choléra «d'une autre façon».

En outre, une analyse génétique de la souche conforte l'hypothèse de son origine lointaine, soulignent ces médecins qui notent qu'aucune épidémie de choléra n'avait été observée dans le pays depuis plus d'un siècle.

L'infection s'est rapidement propagée par la rivière Meille dans laquelle les eaux usées et des matières fécales du camp des soldats népalais se déversaient.

«Nous pensons que la rivière Meille a été le vecteur du choléra durant les premiers jours de l'épidémie en véhiculant suffisamment de concentration de la bactérie pour provoquer l'infection chez une personne qui a bu de cette eau», concluent les auteurs de cette recherche.

Ensuite, le choléra s'est propagé via la rivière Artibonite dont la Meille est un affluent.

«Nos enquêtes, aussi bien que les analyses statistiques, révèlent que la contamination s'est produite simultanément dans sept communes situées sur les rives de l'Artibonite», soulignent les chercheurs.

«Nous sommes au courant du rapport et comme pour les autres, nous allons rapidement étudier ses conclusions», a réagi un porte-parole de l'ONU, Farhan Haq. «Nous regardons tout cela très sérieusement», a-t-il ajouté.

«Comme vous le savez, nous sommes très préoccupés par l'épidémie de choléra en Haïti, raison pour laquelle le secrétaire général (Ban Ki-moon) avait mis en place en début d'année un groupe d'experts indépendants» pour enquêter sur l'origine de l'épidémie, a-t-il souligné.

L'ONU avait diffusé il y a quelques semaines une étude qui incriminait une souche d'Asie du Sud tout en se gardant d'accuser le camp des Casques bleus népalais d'être la source de la contamination.

Fin novembre 2010, après avoir mené une mission de plusieurs jours sur place à la demande du gouvernement haïtien, l'épidémiologiste français Renaud Piarroux avait assuré que l'épidémie avait été importée, la souche ne pouvant provenir ni de l'environnement, ni des camps de sinistrés du séisme du 12 janvier 2010.

Selon des chiffres du ministère de la Santé publique haïtienne, 5506 personnes sont mortes depuis l'apparition du choléra fin 2010.