Dans un vaste camp de tentes étalées à perte vue qui hébergent plus de 25 000 sans abri du séisme de 2010, les pluies torrentielles qui s'abattent sur Haïti depuis quelques jours sont venues empirer une situation déjà précaire.

La protection civile haïtienne faisait état mardi de 23 morts et 6 disparus dans l'ensemble du pays, ainsi que de nombreux blessés et des centaines de personnes qui ont dû être évacués.

Des femmes et des jeunes vivant dans le camp Accra, situé sur la commune de Delmas à Port-au-Prince, se sont retrouvés les pieds dans l'eau, armés de pelles et de brouettes, et se démenaient pour évacuer les eaux boueuses qui ont envahi leurs abris recouverts de bâches.

«La vie de 25 000 personnes est menacée, des familles n'ont même plus de tente pour dormir alors que le choléra se pointe à nouveau», dit Antoine Jespère, coordonnateur du camp, qui s'inquiète du sort des enfants et des vieillards abandonnés.

Tandis que des dizaines de volontaires s'employaient à mains nues à tenter de chasser l'eau crasseuse mélangée à celle des égouts armés de seaux, de pelles et de brouettes, une ambulance de l'ONG américano-française ALIMA évacuait des malades du choléra.

Assise sur un muret qui borde une ravine en crue, Philomène Jeantulien a posé la pelle à ses pieds, elle n'a plus le courage de continuer.

«Je suis une nouvelle fois victime. J'ai tout perdu hier soir, c'est cela ma vie», se lamente-t-elle. «Tout, mais j'ai réussi heureusement à sauver ma fille», poursuit-elle la voix de plus en plus faible. «Je voudrais quitter ce pays».

À l'exemple d'autres résidents du camp, cette femme de 29 ans a rassemblé quelques maigres affaires: de vieilles couches, des ustensiles noircis au charbon...

La pluie va continuer dans les prochains jours, ont annoncé les autorités haïtiennes, et près de 500 familles sinistrées à la suite des intempéries doivent trouver de nouveaux abris.

Dans la capitale, plus de 30 camps de réfugiés ont été inondés, rendant plus précaires les conditions de vie de centaines de milliers de personnes qui vivent sous des tentes depuis le violent séisme qui a ravagé Haïti en janvier 2010.

Pétion-ville, une banlieue de l'est de la capitale, compte de nombreuses victimes, 13 au total dont 6 à Péguy-ville, le quartier de résidence du nouveau président Michel Martelly.

Depuis lundi soir le nouveau locataire du palais national d'Haïti en ruines depuis le séisme fait la tournée des régions sinistrées, distribuant couvertures et rations alimentaires à ses compatriotes.

Les inondations ont entraîné des dégâts matériels considérables dans plusieurs communes de la capitale où des rues ont été coupées par des chutes d'arbres et des éboulements.

Dans plusieurs quartiers de Port-au-Prince, des rues ont été transformées en rivières et des maisons ont cédé à la pression des eaux qui ont renversé des véhicules.

Les autorités haïtiennes ont décrété l'alerte orange sur le pays en raison d'une zone dépressionnaire, localisée au sud-ouest de la mer des Caraïbes depuis la semaine dernière qui continue d'occasionner des averses significatives sur le pays.