Le 8 janvier, Acapulco s'est réveillé dans l'horreur. Quinze corps décapités étaient empilés sur le trottoir, devant un supermarché. Les têtes étaient regroupées dans un coin. La police n'a pas eu à chercher les coupables: le massacre était signé par les hommes de Joaquin «El Chapo» Guzman, chef du cartel de la Sinaloa.

C'est ce que les Mexicains appellent la «messagerie cadavérique». Les tueurs des cartels de la drogue ne se contentent pas d'abattre leurs ennemis: ils mutilent les corps pour faire passer leurs messages. Et propager la terreur.

Ils tuent les gens, dépècent les cadavres puis écrivent sur un carton ou un chandail taché de sang: «Il parlait trop.» Ou alors: «Ça lui apprendra le respect.»

Charles Bowden a interviewé l'un de ces tueurs. «Il m'a confié à quel point c'était un embarras pour lui de mutiler les gens. On ne lui commandait pas simplement un meurtre. Il devait personnaliser le corps. Couper des membres, déplacer le cadavre.» Bref, s'adonner à une lugubre mise en scène. «Il n'y a pas de fin à ce qu'ils font.»

Parcourir Juárez ressemble parfois une visite guidée de l'horreur. Ici, un homme a été crucifié sur une clôture et affublé d'un masque de cochon. Là, on a retrouvé un cadavre démembré, son visage écorché et agrafé sur un ballon de soccer. Plus loin, des corps pendus à un pont, amputés de leurs organes génitaux.

Le gouvernement explique cette cruauté par le désespoir des cartels devant les coups portés par les forces de l'ordre. Les Mexicains croient au contraire que plus rien, désormais, n'arrête les membres du crime organisé.