Le bras de fer entre la hiérarchie catholique du Mexique et la gauche s'est durci en ce début d'année après que l'Église eut qualifié de «talibans» la municipalité et le maire de Mexico, Marcelo Ebrard, candidat potentiel de la gauche à l'élection présidentielle de 2012.

L'archevéché de Mexico a accusé les dirigeants de gauche de la mégapole de pratiquer l'intolérance envers l'Église catholique et d'empêcher tout débat sur les lois municipales autorisant l'avortement et les mariages homosexuels dans la capitale.

«Ces types de comportement ne sont pas de bon augure pour les futures responsabilités publiques de ceux qui exercent aujourd'hui l'autorité dans la ville de Mexico», a prévenu l'archevêché dans un article de sa revue «Depuis la Foi».

Marcelo Ebrard est le seul homme politique mexicain à avoir annoncé son intention de participer à la course présidentielle comme candidat du principal parti de gauche, le Parti de la révolution démocratique (PRD).

Cette formation a répliqué en accusant la hiérarchie catholique d'intrusion dans la vie politique et de manoeuvre pour saper une candidature de gauche.

«Il s'agit de toute évidence d'une menace voilée contre les aspirations présidentielles du maire de la capitale», estime Hortensia Arangon, secrétaire générale du PRD.

Pour certains dirigeants de ce parti, l'Église vient de se lancer dans l'affrontement le plus sérieux sur le terrain politique depuis la «Cristiada» (Guerre des Cristeros) qui opposa à la fin des années 20 des guérillas catholiques au gouvernement mexicain, à l'époque fortement anticatholique.

«Depuis que la hiérarchie ecclésiastique a provoqué l'insurrection armée en 1926, nous n'avions jamais connu une agression aussi ouverte», a dit à l'AFP un parlementaire du PRD, Victor Cirigo.

Avec 70% de catholiques sur 112 millions d'habitants, l'influence de l'Eglise est importante au Mexique, mais à un degré moindre que dans d'autres pays d'Amérique latine.

Son prestige a été écorné par des scandales de pédophilie comme celui qui a atteint la congrégation des Légionnaires du Christ l'année passé.

L'Eglise mexicaine est en outre confrontée à la montée de cultes parallèles comme celui de la «Sainte Mort», une secte considérée comme liée aux narcotrafiquants.

L'influence de la hiérarchie catholique reste toutefois importante comme l'a démontré sa campagne de 2008 et 2009 qui est parvenue à interdire l'avortement dans 17 des 32 Etats mexicains, un contrepoids à sa dépénalisation dans la capitale du pays.

La hiérarchie catholique, en accord avec le Parti action nationale (PAN, conservateur) du président Felipe Calderon, a également déposé un recours en constitutionnalité contre la loi sur le mariage homosexuel, entrée en vigueur dans la ville de Mexico au mois de mars.

Selon Javier Angel, théologien et professeur d'université, Marcelo Ebrard continuera d'être la cible de critiques de l'Eglise.

«Dans une année qui précède l'ouverture de la compétition électorale, les évêques vont tenter de prendre publiquement leurs distances avec les candidats qui ne partagent pas ses objectifs et Ebrard, avec ses positions libérales, représente justement le pôle opposé», selon M. Angel.