Le Mexique célèbre aujourd'hui le centenaire de sa révolution. Les moustachus Pancho Villa et Emiliano Zapata seront à l'honneur, mais également Las Adelitas, ces femmes qui ont pris les armes avec les révolutionnaires et propulsé la gent féminine au premier rang de la lutte politique. Cent ans plus tard, où sont passées les Mexicaines? Car si les Latino-Américaines accèdent aujourd'hui aux plus hauts échelons du pouvoir au Brésil, en Argentine ou au Chili, la scène politique mexicaine reste accaparée par les hommes, explique notre collaboratrice.

Pour elles, on a inventé le terme de soldaderas: les soldates. Mais elles ont perduré dans la mémoire des Mexicains sous le nom d'Adelitas.

 

Ces femmes, qui ont combattu aux côtés de Pancho Villa et Emiliano Zapata lors du soulèvement populaire qui a éclaté le 20 novembre 1910 contre la dictature de Porfirio Diaz, incarnent la révolution mexicaine au féminin. Les Adelitas étaient des femmes révolutionnaires qui accompagnaient les troupes: cuisinières, infirmières, messagères et soldates.

Certaines d'entre elles, comme les zapatistes Amelia «La Güera» Robles ou Rosa Bobadilla, ont atteint le grade de colonel. Aujourd'hui encore, elles sont considérées comme des pionnières dans la lutte des femmes pour accéder au pouvoir, mêmes si elles adoptaient parfois une apparence masculine pour se faire accepter.

Que s'est-il passé en 100 ans? Alors que le Brésil et le Costa Rica viennent d'imiter le Chili (du temps de Michelle Bachelet) et l'Argentine en élisant une femme au poste de président, le Mexique est pratiquement dépourvu de figure politique féminine de premier rang.

Quand les Mexicains évoquent les femmes et la politique, le nom de Marta Sahagún, la femme de l'ex-président Vicente Fox, fait immanquablement irruption. «Martita», comme la surnomme tout le pays, voulait se porter candidate pour succéder à son mari, projet auquel elle a finalement renoncé. Il ne s'agit donc même pas d'une élue, sinon d'une ex-première dame ayant caressé des ambitions présidentielles.

Dans l'histoire du Mexique, seules quatre femmes ont été candidates à la présidence et aucune n'avait réellement de chances de l'emporter. La plus célèbre reste la militante d'extrême-gauche Rosario Ibarra, aujourd'hui sénatrice à 83 ans. Ceux qui estiment que les femmes ont accompli une belle percée en politique citent le cas de Beatriz Paredes, actuelle présidente du Parti révolutionnaire institutionnel (PRI), la première force politique. «Mais c'est l'exception qui confirme la règle», juge l'analyste et homme politique Mario Luis Fuentes.

«On a voulu faire de Beatriz Paredes un cas emblématique, alors qu'il met surtout en évidence la faible présence des femmes dans la sphère publique. Qu'il s'agisse de la prise de décision sur le plan politique ou économique, le rôle des femmes n'a pas évolué depuis 100 ans.»

Quant à Patricia Espinosa, ministre des Affaires étrangères et une des deux seules femmes du cabinet du président Felipe Calderon, elle se caractérise surtout par sa discrétion. «C'est la plus invisible du gouvernement alors qu'elle dispose d'une vitrine internationale», regrette Mario Luis Fuentes. Josefina Vazquez Mota, députée de droite et possible aspirante à la présidence, représente actuellement, aux yeux des analystes, la figure politique féminine au potentiel le plus élevé.

Au Mexique, la loi impose aux partis de présenter un minimum de 40% de candidates aux élections. Récemment, la perversité des quotas a éclaté au grand jour: 11 femmes élues députées lors des élections législatives du 4 juillet dernier ont cédé leur place à leurs suppléants hommes. Leur tâche était terminée: se présenter sur les listes pour permettre à leur parti de respecter les quotas.

Bien souvent, les femmes ne subissent pas mais orchestrent la discrimination à leur encontre. «Les femmes mexicaines sont extrêmement conservatrices», analyse Fernanda Somuano, politologue à l'institut universitaire Colegio de Mexico. «Je pense que les femmes se sont automarginalisées de la vie politique, en se convainquant que leur place était à la maison.» Les Adelitas, ces femmes qui prenaient les armes, sont loin...