«Que cela ne se produise plus jamais, ni dans mon pays ni dans aucun autre au monde...» les mots d'Edison Pena, l'un des 33 miraculés de la mine de San José, rappellent l'urgence de renforcer la sécurité du secteur minier au Chili, hissée au rang de priorité par le gouvernement.

Dans les semaines suivant l'accident du 5 août, l'exécutif a déjà annoncé une réforme de la sécurité dans ce secteur représentant 15,5% de son PIB et plus de la moitié de ses exportations (plus de 30 milliards de dollars, 22 milliards d'euros) l'an dernier.

Le budget va être plus que doublé, à 56 millions de dollars et le nombre d'inspecteurs triplés, à 45... pour 174 000 travailleurs répartis dans près de 3500 entreprises.

Le Chili est le premier producteur mondial de cuivre, avec un tiers de l'offre planétaire, et il produit aussi de l'or, de l'argent ou du zinc.

Le réforme passe aussi par une refonte du Service national de Géologie et des Mines (Sernageomin) et des recommandations d'ici novembre d'un comité d'experts pour revoir la législation actuelle en matière de sécurité minière.

«Nous ne tolérerons plus qu'on puisse travailler dans ces conditions aussi peu sûres et humaines comme c'était le cas à la mine San José, et dans beaucoup d'autres endroits», a promis le président Sebastian Pinera après le sauvetage des «33» mercredi.

«Il a fallu qu'il nous arrive cette tragédie, que nous soyons sur le point de mourir, pour qu'à présent ils regardent l'aspect sécurité», méditait amèrement Pena dans ses premières heures de liberté, après sa sortie d'hôpital jeudi soir.

San José était un cas d'école: une mine de taille moyenne (150 mineurs), vieille (exploitée depuis plus de 110 ans) et laxiste en matière de sécurité.

Des proches des mineurs et d'anciens de San José ont accusé la direction d'avoir surexploité la mine, et ignoré les avertissements de mineurs qui disaient que la mine «résonnait», signe selon les hommes d'un affaissement à venir.

«Et que disait-on aux ouvriers? Non, vas-y quand même à la mine, même si la colline résonne», se plaint Pena.

Quand les 33 piégés par l'éboulement ont voulu sortir par les cheminées de ventilation verticales, «les échelles n'arrivaient que jusqu'à une certaine hauteur», a raconté le mineur Richard Villaroel depuis son lit d'hôpital.

Mais il y a pire que San José. Dans les semaines suivant l'accident, l'AFP a visité à Tierra Amarilla, dans la même région, des mines exploitées temporairement, et plus ou moins encadrées: le monde des «pirquineros», ces «temporaires» de la mine travaillant souvent sans filet.

Aux côtés des groupes géants dont la sécurité est vantée, les BHP Billiton, Xstrata ou Barrick, les petites unités concentrent la majorité des 31 morts enregistrés chaque année dans les mines chiliennes.

De fait, les politiques chiliens s'évertuent à dissocier les «bons» et les «mauvais» entrepreneurs miniers, mais avouent aussi une certaine impuissance.

«Comme on ne peut éviter les accidents de voiture, on ne peut pas garantir d'éviter (un accident minier) par davantage de normes», a plaidé le ministre des Mines Laurence Golborne la semaine écoulée.

À son retour chez lui vendredi, le mineur Florencio Avalos, premier des «33» à avoir regagné la surface, a appelé les patrons miniers du Chili à investir dans la sécurité.

Mais sans espoir démesuré: «Mon message aux travailleurs est de prendre soin d'eux-mêmes», a-t-il dit.