Le président socialiste du Venezuela Hugo Chavez a accéléré sa révolution agraire destinée à augmenter la production de ce pays importateur de produits agricoles en annonçant de nouvelles expropriations, critiquées par l'opposition pour qui elles génèrent des pénuries.

Le chef de file de la gauche radicale latino-américaine a annoncé dimanche la «récupération» de 250 000 hectares de terres jugées improductives en octobre et l'expropriation de la société Agroislena, pilier du secteur agricole, accusée d'augmenter indûment le prix des engrais.

Il entend ainsi reprendre sa lutte contre les «latifundia» (grandes propriétés) et la «spéculation» après avoir observé une sorte de trêve avant les législatives de fin septembre, marquée par la victoire plus courte que prévue de son parti et le retour en nombre de l'opposition au parlement.

Depuis l'arrivée au pouvoir de Chavez en 1999, l'État vénézuélien a pris le contrôle d'environ 3 millions d'hectares, soit un dixième des terres cultivables du pays (30 millions d'hectares).

Ces derniers mois, il a également nationalisé plusieurs entreprises productrices ou distributrices d'aliments (lait, café, sucre, céréales) et a racheté les supermarchés Exito, appartenant au français Casino, pour créer un réseau de magasins «socialistes» à prix cassés.

En outre, l'Assemblée nationale (monocamérale) a adopté en juin une réforme de la loi sur les terres, qui condamne le système des latifundia et octroie à l'État un rôle «déterminant» dans la production et la distribution d'aliments et de produits agricoles.

«Nous allons accélérer la révolution agraire pour qu'il ne reste plus de latifundia dans ce pays», a déclaré le chef de l'État.

Le but est de «continuer à stimuler le développement agricole et de marcher plus rapidement vers la souveraineté alimentaire» dans ce pays largement importateur de produits alimentaires, alors qu'il est le premier exportateur latino-américain de pétrole.

L'opposition dénonce pour sa part une nouvelle agression contre le secteur privée et assure que cela ne résoudra en rien le problème des pénuries dans ce pays, où il est parfois difficile de trouver du lait, du sucre, du café ou de l'huile.

José Manuel Gonzalez, élu député fin septembre et ancien président de la Confédération nationale des Associations de producteurs agricoles (Fedeagro), affirme notamment que la superficie cultivée a chuté de 22% depuis le début de l'année, que la production agricole a baissé et que les importations ont augmenté.

Les responsables d'Agroislena ont pour leur part demandé à Chavez d'annuler leur expropriation, au motif qu'ils ont fourni «un soutien constant à la production agricole nationale» et contribué à «la sécurité alimentaire» du pays.

Agroislena fournit 60% des matières premières utilisées par le secteur agricole et accorde des crédits pour acheter ses produits à plus de 18.000 producteurs, selon des chiffres du secteur.

«Agroislena est un pilier de l'agriculture vénézuélienne. Cette mesura aura des conséquences brutales: cela revient à remettre l'agriculture du pays entre les mains inefficaces de l'État», estime German Briceno, président de l'institut de politiques agricoles de Fedeagro.

L'agriculture représente environ 5% du PIB vénézuélien, mais il ne s'agit que d'une estimation, car, depuis 2007, les chiffres officiels sur le secteur se confondent avec ceux de l'hôtellerie et de la restauration.