Le chef militaire de la guérilla colombienne des Farc, Luis Suarez, alias Jorge Briceno ou «Mono Jojoy», a été tué par l'armée lors d'une opération militaire menée mercredi et jeudi, un coup «historique» contre ce groupe armé.

La mort de ce membre du bureau politique de la guérilla, qui en compte sept, a été annoncée à Bogota par le ministère de la Défense et le parquet, puis par le président colombien Juan Manuel Santos, depuis New York, où il participe à l'Assemblée générale des Nations unies.

«C'est le coup le plus dur» porté à la guérilla des Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc, marxistes) a déclaré Juan Manuel Santos, ex-ministre de la Défense (2006-2009) au pouvoir depuis le 7 août qui avait promis d'intensifier encore la politique de fermeté à l'égard des Farc.

«C'est une nouvelle historique pour notre pays», a-t-il encore déclaré à des journalistes.

Juan Manuel Santos a aussi considéré que ce coup était encore «plus important» que celui porté à la guérilla lorsque son numéro deux Raul Reyes avait été tué, le 1er mars 2008, dans un bombardement contre un campement de la guérilla en Equateur: «il incarnait la terreur et la violence», a-t-il ajouté.

Le cadavre du chef militaire de la guérilla, âgé de 57 ans et qui avait gravi ses échelons depuis 1975 selon la police, a été trouvé dans la nuit de mercredi à jeudi dans le département central de Meta, non loin de la municipalité de la Julia, dans la sierra de La Macarena.

Une vingtaine de combattants des Farc ont également été tués.

L'opération planifiée en secret a impliqué tous les corps d'armée.

Plus de 70 aéronefs ont été utilisés, une cinquantaine de bombes, et plusieurs centaines de militaires.

Le Mono Jojoy, était depuis plusieurs années l'homme le plus recherché par l'armée colombienne, au côté d'Alfonso Cano, le dirigeant de cette guérilla.

Selon les spécialistes ce fils de paysans du département de Boyaca (nord) était le dernier «mythe» vivant de la guérilla, où il était craint et admiré et son principal stratège militaire depuis le début des années 1990. Sa mort sera pour celle-ci «dévastatrice» a déclaré à l'AFP l'expert Ariel Avila, auteur d'une enquête sur le Mono Jojoy.

«Toutes les opérations militaires étaient ordonnées et coordonnées par lui. De lui dépendait la structure militaire», a aussi souligné l'ex-président Andrés Pastrana (1998-2002).

Certains anciens otages des Farc ayant retrouvé la liberté ces dernières années, ont souligné aussi jeudi sa «cruauté».

Le chef militaire des Farc, qui dirigeait le «bloc oriental», son plus puissant front, était également recherché aux Etats-Unis pour trafic de cocaïne et l'enlèvement de trois otages américains, libérés le 2 juillet 2008 lors de l'opération militaire Jaque, au côté d'Ingrid Betancourt et de onze autres otages colombiens.

En Colombie, il était visé par de nombreux mandats d'arrêts et accusé d'homicides, d'enlèvements et de terrorisme.

La Maison Blanche a réagi jeudi à l'annonce de sa mort en évoquant une «victoire importante pour la Colombie».

A Bogota certains ont considéré que sa disparition pourrait en outre entraîner une débandade propice à un dialogue.

Depuis 2008, la guérilla des Farc, fondée en 1964, a perdu trois dirigeants historiques, dont son principal fondateur Manuel Marulanda, mort de maladie fin mars 2008 et deux membres du bureau politique, Raul Reyes et Ivan Rios. Elle avait tenté depuis de se ré-organiser et augmenté ses actions visant les forces de l'ordre, blessant ou tuant plus de 2300 soldats en 2009.

Mais pour le politologue Fernando Giraldo, aucun autre dirigeant actuel de la guérilla n'avait la stature du «Mono Jojoy», un «radical» et un «orthodoxe» dont le départ pourrait faciliter des discussions de paix.

Sa mort, «ouvre un mince espoir» en ce sens a aussi estimé l'ex-otage Ingrid Betancourt, qui l'avait rencontré deux fois.