Alors que l'opération de secours de 33 mineurs piégés à 700 mètres sous terre va accaparer l'attention pendant trois à quatre mois, les «autres» hommes de la mine San José se démènent en surface pour ne pas être oubliés, pour leurs salaires et leur avenir.

Chaque jour, ils viennent pointer scrupuleusement à la mine de cuivre et d'or et accomplir virtuellement leur tour de 12 heures, en même temps qu'ils s'enquièrent des nouvelles des «enfants» (c'est ainsi qu'ils appellent leurs compagnons prisonniers de la mine depuis 26 jours).

«On regarde comment vont se passer ces mois pendant que les enfants sont au fond de la mine», explique à l'AFP Carlos Avalos. «On veut savoir qui va nous payer ces mois-là. Jusqu'ici, ce n'est pas clair».

«Alors il faut venir pointer car l'entreprise pourrait avoir un argument pour nous licencier si on ne le fait pas».

Si l'angoisse domine pour les mineurs piégés au fond de San José et leurs familles, l'incertitude économique pèse sur tout le personnel de San Esteban, groupe minier propriétaire de la mine, et les 345 personnes qu'il fait vivre, entre mineurs, administratifs et collaborateurs divers.

La direction de San Esteban a prévenu la semaine dernière qu'elle était au bord de la faillite après l'accident du 5 août et qu'elle «doutait» de pouvoir régler les salaires du personnel.

La justice, jeudi, a ordonné le gel de 1,8 millions de dollars US de revenus du cuivre que devait percevoir le groupe, en prévision de futures demandes d'indemnisations.

«Les salaires d'août ont été versés, mais on ne sait pas ce qui se passera en septembre», commente Avalos.

«S'ils se déclarent en faillite, nous on reste dans les limbes. Le président (Sebastian Pinera) et les ministres du Travail et des Mines nous ont dit qu'ils nous appuieront à 100% et qu'ils nous reclasseront. Mais on voudrait que ce soit écrit car les paroles s'envolent».

Lundi, le syndicat de San Esteban a demandé à l'État de se poser en médiateur et de régler les salaires des mineurs, quitte à se retourner ensuite vers la mine.

«Nous voulons que l'entreprise soit débitrice auprès du gouvernement, pas des travailleurs», a déclaré Evelyn Olmos, présidente du syndicat.

Le gouvernement s'est déjà dit prêt à explorer «toutes les voies légales» face à San Esteban pour récupérer les coûts des opérations de secours. Mais la prise en charge des mineurs est une limite qu'il n'est pas prêt à franchir.

«Le gouvernement n'est pas habilité à le faire», a dit le ministre des Mines Laurence Golborne. «Il existe au Chili quantité de personnes sans travail et si la solution était si simple, elle serait appliquée depuis longtemps».

«Il faut travailler au cas par cas, chercher à résoudre le problème de chacun, en fonction de son âge, de sa qualification» en vue d'un reclassement, a-t-il ajouté.

«Nous avons déjà 180 offres d'emplois dans d'autres entreprises minières», a affirmé lundi le vice-ministre du Travail Bruno Baranda qui a rencontré des salariés de San José sur le site. La présence quotidienne de plusieurs membres du gouvernement est de nature à rassurer des mineurs inquiets pour leur avenir.