L'opposition et le pouvoir criaient victoire après les élections régionales de dimanche au Mexique, marquées par un statu quo difficile à déchiffrer à un an de la présidentielle et après une campagne endeuillée par des assassinats de candidats, imputés aux cartels de la drogue.

L'élection des gouverneurs dans 12 des 32 États fédérés constituait un test pour le président Felipe Calderon qui ne pourra pas se représenter l'an prochain, et le Parti d'action nationale (PAN, conservateur), sa formation déjà battue aux législatives de 2009 par le Parti révolutionnaire institutionnel (PRI, centre gauche). «Notre triomphe est indiscutable», a déclaré Beatriz Paredes, dirigeante nationale du PRI, après l'annonce de résultats officieux, donnant neuf des 12 postes de gouverneur à sa formation qui a dirigé le Mexique de 1928 à décembre 2000 avant de céder la place au PAN.

Mais le PAN qui a passé une alliance contre nature avec le Parti de la révolution démocratique (PRD, gauche) dans certains États, souligne que le PRI n'a gagné aucun poste de gouverneur et a perdu trois de ses fiefs, les États de Oaxaca (sud), Sinaloa (nord-ouest) et Puebla (centre).

Les résultats officiels de ces élections, destinées aussi à renouveler 14 assemblées régionales et les maires de 1 500 villes, sont attendus mercredi.

Le PAN a par ailleurs dénoncé des raids contre ses quartiers généraux dans les États de Veracruz et de Hidalgo, ainsi que l'arrestation de 12 de ses collaborateurs, ordonnées selon lui par le PRI.

Ce scrutin constituait aussi un test pour la politique du gouvernement en matière de lutte contre le trafic de drogue et ses cartels. Depuis son arrivée au pouvoir fin 2006, M. Calderon a fait déployer 50 000 militaires pour lutter contre ces organisations criminelles qui se battent pour le contrôle du trafic vers les États-Unis, premier consommateur mondial de cocaïne.

M. Calderon revendique des succès avec l'arrestation ou l'élimination d'une vingtaine de barons de la drogue, mais l'opposition parle d'échec, car la guerre des cartels a fait 23 000 morts depuis son arrivée au pouvoir.

Là aussi les résultats ne sont pas faciles à analyser. Le PRI a arraché la mairie de Chihuahua, capitale de l'État du même nom, où quatre cadavres ont été retrouvés pendus sous des ponts dimanche. Au total, 20 meurtres ont été recensés le jour du scrutin dans cet État, parmi les plus violents du pays.

Mais l'alliance PAN/PRD a conquis le poste de gouverneur dans l'État de Sinaloa, lui aussi particulièrement ravagé par la guerre des cartels.

L'influence des cartels sur les élections et les milieux politiques est dénoncée de longue date, mais elle n'avait jamais été aussi sanglante, avec l'assassinat de deux maires, d'un candidat municipal et surtout d'un candidat donné favori pour le poste de gouverneur de l'État de Tamaulipas (nord-est), Rodolfo Torre (PRI), à six jours du scrutin.

Son frère Egidio Torre qui l'a remplacé comme candidat, a été élu avec 66% des voix, selon un sondage à la sortie des bureaux de vote réalisé par la chaîne Televisa.

«Mes sentiments sont contrastés», a déclaré M. Torre qui a voté vêtu d'un gilet pare-balles et entouré de nombreux policiers.

   Le «pouvoir d'intimidation des cartels» est confirmé par la participation au scrutin particulièrement faible dans les États du nord du pays, où ils sont le plus meurtriers, souligne Jose Antonio Crespo, chercheur au Centre de recherche et d'enseignement en économie (CIDE): pour une moyenne générale de 48,2% de votants, selon les chiffres officiels, on a enregistré 35,8% de votants dans le Chihuahua, 39,7% dans le Tamaulipas, et 40% en Basse-Californie.