Les Colombiens ont commencé dimanche à voter pour élire le successeur du président Alvaro Uribe, au pouvoir depuis huit ans, lors d'un scrutin qui oppose principalement son dauphin Juan-Manuel Santos à l'excentrique Antanas Mockus, adepte du «changement».

Les bureaux de vote ont ouvert à 8h00 (09h00 HAE) et fermeront à 16h00 (17h00 HAE).

Le chef de l'Etat sortant a été l'un des premiers à déposer son bulletin dans l'urne pour choisir l'homme qui lui succédera, dans un bureau du centre historique de Bogota.

«Le vote libre et en conscience sert la dignité de la Patrie», a-t-il déclaré.

Les 30 millions d'électeurs devront choisir parmi les neuf candidats en lice, dont deux caracolent en tête avec plus de 30% des intentions de vote, selon les sondages.

Juan-Manuel Santos, ex-ministre de la Défense (2006-2009) se présente comme l'homme de la continuité. Candidat du Parti social d'union nationale (Partido de la U, droite) il promet de préserver l'«héritage» d'Alvaro Uribe, qui reste l'un des plus populaires dirigeants d'Amérique latine pour sa politique de fermeté à l'égard de la guérilla des Farc. Le nombre de combattants des Farc (7500 selon le ministère de la Défense) a été divisé au moins par deux depuis qu'il a été élu, en 2002.

De son côté Antanas Mockus, ex-maire de Bogota et candidat du Parti vert, appelle le pays à un «changement radical» de culture, contre la violence, la corruption et les «excès» de la lutte contre les Farc, notamment en matière de violations des droits de l'Homme.

M. Mockus, qui a axé sa campagne sur le retour à la «morale» et à la légalité en Colombie, premier producteur mondial de cocaïne, talonnait à la veille du scrutin M. Santos dans les sondages. Déjà candidat en 2006, il n'avait alors obtenu que 1,2% des voix.

Il a voté dimanche matin, les mains jointes en position de prière devant l'urne.

«C'est un devoir de citoyen mais c'est avant tout un droit qui peut faire beaucoup de bien», a-t-il déclaré. «J'espère que ce sera un moment historique, même pour le monde», a-t-il aussi dit en français, à l'AFP.

Près de 340 000 membres des forces de l'ordre ont été mobilisés pour garantir la sécurité.

Le ministre de la Défense Gabriel Silva a assuré que ce scrutin serait le «plus tranquille des 30 dernières années» dans ce pays de 46 millions d'habitants, partageant des frontières avec cinq pays d'Amérique du sud.

La veille, Juan-Manuel Santos avait aussi souligné à quel point le pays avait changé, évoquant l'ambiance de «paix et de tranquillité» sans précédent qui avait entouré la campagne.

Il y a huit ans, le jour de la prise de fonction d'Alvaro Uribe, trois roquettes et une bonbonne de gaz avaient explosé à proximité du palais présidentiel, faisant une vingtaine de morts.

Des combats ont toutefois été rapportés dimanche dans deux départements du nord et du sud-ouest du pays, ainsi que des actes d'intimidation d'électeurs. Dans le département de Bolivar (nord), un soldat a été tué, a annoncé son gouverneur, Jorge Mendoza.

Les Colombiens, dont 46% vivent sous le seuil de pauvreté, sont surtout préoccupés par un chômage élevé (13%) et la multiplication des scandales de corruption et de violations des droits de l'homme, notamment attribuées à l'armée, responsable de milliers d'exécutions extrajudiciaires.

Des résultats partiels devaient être publiés vers 19h30 (20h30 HAE).

Pour le chef de la mission d'observation électorale de l'Organisation des Etats américains (OEA), Enrique Correa, «la principale préoccupation sera la transmission des résultats», défectueuse lors des législatives du 14 mars, dont ont attend toujours les résultats certifiés.

«Le scrutin est très serré», entre M. Santos et M. Mockus, au coude à coude, a-t-il souligné en évoquant les risques de contestation des résultats.

En cas de ballotage, un second tour est prévu le 20 juin.