Les altermondialistes, invités en Bolivie par la gauche radicale sud-américaine, ont promis jeudi de lutter pour défendre la création d'un «tribunal climatique» et une réduction drastique des gaz à effet de serre lors des prochaines négociations climat au Mexique.

La «Conférence des peuples» sur le changement climatique, réponse «alternative» aux négociations climat inter-États en souffrance depuis cinq mois, a émis une série de résolutions radicales, au bout de trois jours de débats à Cochabamba, localité du centre du pays.

Beaucoup sonnent comme des voeux pieux qui seront transmis au prochain round de négociations à Cancun.

Mais le président socialiste du Venezuela Hugo Chavez a promis en clôture une «bataille» au Mexique en décembre, si les pays industrialisés, États-Unis en tête, tentent d'imposer «sous la table» l'accord a minima adopté à Copenhague fin 2009.

Le Venezuela, comme la Bolivie, fait partie de la poignée de pays farouchement opposés à cet accord visant un réchauffement de la planète limité à 2 degrés.

Le forum s'est montré plus ambitieux en demandant une réduction de 50% des gaz à effet des serre d'ici 2020 par «des obligations collectives, puis individuelles» pour les grandes économies, au lieu d'engagements nationaux sans contraintes.

Il a aussi demandé la création d'un «tribunal climatique international» pour juger les États, entreprises ou personnes contribuant à réchauffer la planète, veut faire adopter à l'ONU une «Déclaration des droits de la Terre» en cours d'élaboration et a lancé une campagne pour un référendum mondial sur l'environnement le 22 avril 2011, prochaine Journée de la Terre.

Durant trois jours, plus de 20 000 délégués de mouvements sociaux, peuples indigènes, ONG, groupes écologistes, ont cloué au pilori les pays industrialisés pour leur «dette historique» envers le réchauffement climatique.

Le forum, que beaucoup espéraient voir donner un nouveau souffle aux négociations climat, a peiné à s'affranchir d'un ton idéologique.

«Soit le capitalisme meurt, soit c'est la Terre», a déclaré Evo Morales en ouverture. «La seule voie pour sauver l'espèce humaine est le socialisme», a conclu jeudi Hugo Chavez, seul chef d'État étranger à s'être déplacé.

Le forum est «surtout resté une critique de l'extérieur, plutôt qu'un apport» au processus de négociations climat, a déploré l'ambassadeur de France pour le climat Brice Lalonde, qui juge «préférable de construire à partir de Copenhague, que de le rejeter».

M. Morales souhaite prolonger l'esprit de Cochabamba en lançant un «Mouvement international pour la défense de la Terre Mère», volonté de la gauche radicale d'occuper le thème du climat.

«Il est plus important aujourd'hui de défendre les droits de la Terre mère que de défendre les droits de l'homme, car fondamentalement» c'est la même chose, a-t-il estimé.

Mais à l'image des Indiens Samish d'Alaska menacés par l'érosion du littoral ou des Boliviens par la fonte des glaciers, le forum a aussi donné une tribune à des populations, souvent pauvres, en première ligne du réchauffement climatique.

«Nous devons écouter beaucoup plus» la société civile, a reconnu la représentante de l'ONU en Bolivie, Yoriko Yasukawa, saluant une réunion qui a permis «que les gens normalement sans participation aux forums formels puissent se faire entendre, parler entre eux».

«On a entendu beaucoup de frustrations à l'encontre du processus formel de négociations (climat), la perception qu'il n'y pas d'espace pour leur participation», a-t-elle déclaré à l'AFP. «Ce ressenti, cette frustration, il est important d'en tenir compte».