«Mon mari ne m'avait jamais frappée, c'était la première fois», explique Mindi Rodas, une jeune maman guatémaltèque de 21 ans: on lui refait un visage dans un hôpital de Mexico, reconstruisant de greffe en greffe ses traits saccagés à coups de couteau.

«Il m'a attaquée en juillet 2009», explique-t-elle à l'AFP en cachant sous un masque chirurgical sa bouche sans lèvres et un trou à la place du nez. On ne voit que ses beaux yeux marron et son front, gonflé artificiellement pour étirer sa peau et prélever des greffons.

Elle était employée de maison dans son petit village du Guatemala, son mari l'avait quittée et s'est mis en colère quand elle a demandé une pension alimentaire pour leur fils de quatre ans.

«Il m'a cherchée, il voulait revenir. Il m'a dit «Mindi, je t'aime», poursuit-elle.

Elle ne voulait pas, et il l'a frappée à la tête. Elle a perdu connaissance, se souvient seulement d'un couteau qui lui entaillait la face. Elle n'a su que plus tard qu'il avait aussi essayé de la noyer dans la rivière.

Elle s'est réveillée, nue, une bouillie sanglante en guise de visage : «j'ai cru que c'était un cauchemar».

En la voyant, sa mère s'est évanouie, se souvient-elle. Et son petit garçon lui a dit: «quand je serai grand je m'achèterai un pistolet et je tuerai mon papa»...

«J'aurais préféré mourir. J'ai pensé à faire tuer mon mari, mais je ne voulais pas avoir les mains tachées de sang», murmure-t-elle.

«Jamais je ne lui pardonnerai, mais je ne veux pas de vengeance. Il sera jugé pour tentative de meurtre», ajoute-t-elle.

Elle a été soignée, sur place d'abord puis dans un hôpital de la capitale.

L'épouse du président guatémaltèque, Sandra Colom, dont la Fondation lui était venue en aide, a personnellement ordonné son transfert au Mexique, à l'Hôpital public Manuel Gea Gonzalez, une référence mondiale en matière de chirurgie craniofaciale.

Les lésions de Mindi sont similaires à celles de la jeune Française sur laquelle la première greffe de visage avait été effectuée en 2005, selon le chirurgien qui dirige l'établissement, Fernando Ortiz-Monasterio. Depuis, onze greffes de ce type ont réussi à travers le monde.

Mais une transplantation totale serait trop difficile, trop compliquée dans le cas de Mindi, laisse-t-il entendre...

D'où le choix des auto-greffes. Et d'une peau à la texture et à la couleur comparables à celles des zones lésées, pour éviter l'apparence d'une «rustine», explique encore le chirurgien: le front est gonflé de l'intérieur par une espèce de ballon et «la peau s'étire, comme au cours d'une grossesse».

L'excédent de peau servira à reconstruire le nez, dont le cartilage sera prélevé ailleurs dans le corps.

«Ce sera une amélioration très importante, compatible avec la vie en société, et sans l'obligation de médicaments», souligne le Pr Ortiz-Monasterio.

Ce traitement coûterait toutefois des centaines de milliers de dollars dans une clinique privée, tandis que l'Hôpital Manuel Gea Gonzalez ne facture que des médicaments, du matériel et... moins de 10 dollars par jour pour la chambre.