Le président cubain Raul Castro a «regretté» mercredi la mort du prisonnier politique Orlando Zapata qui a succombé la veille à une grève de la faim, une affaire qui a provoqué des détentions préventives de militants et la consternation de Washington.

Au lendemain du premier décès d'un prisonnier politique cubain depuis 1972, Raul Castro a exprimé ses «regrets» dans un acte rare de contrition rapporté par un média internet officiel au cours d'un déplacement au port de Mariel (ouest) avec son homologue brésilien Luiz Inacio Lula da Silva, resté silencieux.

Raul Castro a assuré que Zapata, qui était en grève de la faim depuis près de trois mois pour protester contre ses conditions d'incarcération, n'a jamais été torturé, contrairement à ce qu'a affirmé la mère du détenu, Reina Luisa Tamayo.

A Cuba, «il n'y a pas de tortures, pas d'exécutions. Cela se passe sur la base (américaine) de Guantanamo» (sud-est de Cuba), a lancé le frère et successeur du Père de la Révolution cubaine, Fidel Castro.

La secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton s'est dite «profondément bouleversée» par la mort du maçon dissident de 42 ans, incarcéré depuis 2003. «Nous étions inquiets pour sa santé, et nous avions insisté pour qu'il reçoive des soins médicaux», a-t-elle dit.

Les Etats-Unis et l'Union européenne ont réitéré leur appel à la libération de tous les prisonniers politiques cubains (200, selon la dissidence), après la mort de ce militant radical qui devait être inhumé jeudi matin, et non plus mercredi comme initialement prévu, à Banes (840 km à l'est de La Havane).

Une trentaine de dissidents de cette région orientale qui comptaient s'y rendre ont été détenus provisoirement, certains étant «retenus sans ordre judiciaire dans leur maison», a affirmé à l'AFP la Commission cubaine pour les droits de l'homme, une organisation illégale, mais tolérée par le pouvoir.

L'un des 65 «prisonniers de conscience» figurant sur la liste d'Amnesty international, qui purgeait une peine de 32 ans de prison, Orlando Zapata est décédé mardi dans un hôpital de La Havane où il avait été transféré d'urgence la semaine dernière depuis Camaguey (centre).

La mère de Zapata, Reina Luisa Tamayo, a accusé le gouvernement cubain du «meurtre prémédité» de son fils «torturé» et a appelé «le monde» à «exiger la libération des prisonniers politiques» pour que «cela ne se reproduise pas», dans des déclarations rapportées par la bloggeuse cubaine Yoani Sanchez sur le site www.desdecuba.com/generaciony.

Les Dames en blanc, mères et épouses de prisonniers politiques, ont organisé une veillée funèbre au domicile d'une dissidente à La Havane.

Pratiquement inconnus à Cuba où médias et internet sont étroitement contrôlés par l'Etat, les dissidents sont considérés par les autorités cubaines comme des «agents» et «mercenaires» à la solde de l'«ennemi» américain.

Le site officiel cubain Cubadebate a accusé Zapata d'être un prisonnier de droit commun «transformé après nombre d'allées et venues en prison en un +militant politique+». Il était, selon Cubadebate, «le candidat parfait» pour observer une «grève de la faim absurde» avec «des demandes impossibles (cuisine et téléphone personnel dans sa cellule)».

La Commission européenne a «regretté profondément» cette affaire, mais sans évoquer sa coopération avec Cuba reprise en 2008 après une suspension de cinq ans liée à une vague d'arrestations de dissidents.

Amnesty International a estimé que cette mort était «une illustration horrible de la répression permanente contre les dissidents politiques à Cuba».