Le gouvernement vénézuélien a décrété «l'état d'urgence électrique» pour deux mois, avec obligation pour la population de réduire sa consommation, afin de sortir de la pénurie qui menace la popularité du président Hugo Chavez, à sept mois d'élections législatives.

«Nous déclarons une situation d'urgence électrique (...) pour une durée de 60 jours renouvelables», «il y a vraiment urgence», a annoncé lundi le président Chavez à la radio.

Depuis deux ans au Venezuela, les coupures d'électricité sont fréquentes. Dans ce pays, premier exportateur de pétrole latino-américain et quatrième économie de la région, la production quotidienne d'électricité (16 200 MW) n'est pas suffisante pour répondre à la demande (17 200 MW), qui augmente à un rythme élevé, 6 à 8% par an.

Face à cette situation, le décret d'état d'urgence prévoit de sanctionner tous les usagers privés et commerciaux qui ne réduiront pas leur consommation, soit par des augmentations de facture soit par la coupure du service.

Les usagers privés doivent réduire à partir de lundi leur consommation d'au moins 10%, et les établissements commerciaux de 20%, dans un délai de deux mois.

Pour les commerces, les sanctions peuvent aller jusqu'à la fermeture du service. «Au premier manquement, une pancarte informative sera placée à l'entrée de l'établissement (...) la récidive sera punie par une suspension de 24 à 48 heures, et après, en cas de nouvelle récidive, ce sera définitif», a expliqué Chavez.

Selon Luis Vicente Leon, directeur de l'institut d'enquêtes Datanalisis, la crise électrique a des conséquences sur la vie quotidienne de la population, et «pourrait avoir une influence sur la popularité du président».

Une popularité en baisse

Chavez, dont la cote de popularité a chuté de 10 points ces derniers mois pour avoisiner les 50%, s'est fixé pour objectif de remporter deux tiers des sièges aux législatives de septembre. Le pouvoir contrôle actuellement la quasi-totalité du Parlement, l'opposition ayant boycotté le scrutin de 2005.

Une partie de la population est déjà irritée par de précédentes mesures de rationnement d'électricité et d'eau.

Le gouvernement se justifie en évoquant une sécheresse historique, qui a réduit l'activité de trois centrales hydro-électriques assurant 70% de la production du pays. «Il n'a pas plu de toute l'année, c'est la pire sécheresse au Venezuela en cent ans», selon Chavez.

Le président pointe également du doigt les comportements de «gaspillage» de ses compatriotes. Selon les chiffres officiels, le Venezuela est le premier consommateur d'électricité en Amérique latine, 4 165 KWh par habitant, soit le double de la Colombie, le pays voisin.

Mais des experts et l'opposition dénoncent un manque de maintenance et d'investissements dans le secteur électrique.

Toutefois, le Venezuela a annoncé samedi qu'il prévoyait de doubler sa capacité de production quotidienne d'ici à 2015, ce qui suppose un investissement d'environ 15 milliards de dollars.

Le gouvernement va également acquérir des centrales thermoélectriques à des pays comme la Chine ou la Russie, et a reçu l'expertise de l'Argentine et de Cuba, qui ont envoyé ces derniers jours des experts au Venezuela.

Désormais, avec le décret d'urgence, le ministre de l'Énergie est par ailleurs autorisé à se fournir en électricité auprès de prestataires étrangers ou nationaux, sans passer par des appels d'offre.