La chambre basse du Congrès colombien a commencé à débattre mardi d'un projet de référendum ouvrant la voie à une possible réélection du président Alvaro Uribe pour un troisième mandat, jusqu'ici interdite par la Constitution.

Le Sénat a déjà donné son feu vert la semaine dernière et si la Chambre des représentants donne à son tour son aval ce mardi, le référendum devrait être convoqué d'ici la fin de l'année, afin que la réforme de la Constitution puisse être appliquée pour le prochain scrutin présidentiel, en mai 2010.

Juste avant l'ouverture des débats, qui ont débuté avec plus d'une heure de retard sur l'horaire prévu (16H00 HAE), le ministre de l'Intérieur, Fabio Valencia, a affirmé que l'initiative était défendue par au moins 91 députés, alors qu'il ne lui faut que 84 voix pour être adoptée.

M. Uribe n'a pas encore dévoilé s'il souhaitait briguer un troisième mandat, malgré une popularité record (68%), due aux succès rencontrés dans la lutte contre la guérilla marxiste des Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc) et à une croissance économique sans précédent.

Toutefois, il a réuni mi-août des députés de sa majorité pour leur demander de soutenir l'approbation du projet de référendum.

Le chef de l'État avait été réélu une première fois en 2006 grâce à une autre réforme de la Constitution, qui à l'époque n'autorisait aucune réélection.

Il avait alors suivi l'exemple lancé dans les années 90 par les présidents argentin Carlos Menem (1989-1999) et péruvien Alberto Fujimori (1990-2000), qui avaient fait appel au vote populaire pour obtenir le droit de rester au pouvoir.

Depuis, leur exemple a fait tache d'huile en Amérique latine, puisque 14 des 18 pays démocratiques de la région autorisent la réélection de leur président, avec ou sans conditions.

Seuls le Mexique, le Paraguay, le Guatemala et le Honduras interdisent toujours au chef de l'État d'effectuer plus d'un mandat.

Dans ce dernier pays, le coup d'État du 28 juin a d'ailleurs été justifié par ses auteurs au nom du projet du président déchu de Manuel Zelaya de réformer la Constitution pour autoriser la réélection du chef de l'État.

En Colombie, le texte en débat au Congrès est fortement critiqué par l'opposition (gauche et centre), qui dénonce les cadeaux offerts aux parlementaires - promotions ou subventions pour leurs régions - en échange de leurs votes.

Les autorités électorales ont, quant à elles, jugé illégal le processus en cours.

Même l'Eglise catholique, allié traditionnel d'Alvaro Uribe, l'a appelé à ne pas s'accrocher au pouvoir. «Deux mandats, c'est suffisant», a déclaré le mois dernier le cardinal et archevêque de Bogota, Pedro Rubiano.

«Je ne veux pas être considéré comme quelqu'un qui s'accroche au pouvoir, mais je veux être sûr de la pérennisation de la politique de sécurité démocratique ou des mesures destinées à regagner la confiance des investisseurs», a déclaré la semaine dernière le chef de l'État colombien.

«D'autres présidents de la région avaient utilisé le même argument», relève néanmoins le politologue Leon Valencia, en faisant référence au président vénézuélien Hugo Chavez et à son homologue équatorien Rafael Correa, qui ont récemment réformé la Constitution de leur pays pour pouvoir être réélus.