Le chef de l'État péruvien, Alan Garcia, a nommé samedi comme premier ministre le président du Parlement, Javier Velasquez, membre de son parti, l'APRA, pour tenter de relancer une présidence secouée par des conflits sociaux et une crise sanglante en juin avec les Indiens d'Amazonie.

«Le pays attend maintenant de l'ordre et l'intégration sociale», a indiqué Garcia lors de la prestation de serment de Velasquez, un avocat de 49 ans, troisième premier ministre en trois ans du président de centre-droit.

Le chef de l'État a fixé comme priorité au nouveau gouvernement la «lutte contre la pauvreté» qui, bien qu'en baisse selon les chiffres officiels, touche encore 36,2% de la population.

Il l'a appelé à se méfier du «conflit idéologique» en cours en Amérique du Sud, référence à des gouvernements de gauche comme ceux du Venezuela ou de la Bolivie, soupçonnés par Lima d'être intervenu dans l'agitation sociale au Pérou.

Velasquez n'a jamais été ministre mais a assumé maintes responsabilités au sein de l'Alliance populaire révolutionnaire américaine (APRA), le vieux parti social-démocrate du Pérou dont est issu Garcia, même s'il gouverne depuis trois ans à droite de celui-ci.

Le choix d'un homme d'appareil pour remplacer Yehude Simon, un indépendant de gauche nommé premier ministre en 2008 pour lutter contre la corruption et adoucir l'image de sa politique libérale, suggère que le chef de l'État souhaite resserrer -ou contrôler- sa garde, jusqu'à la fin de son mandat en 2011.

Dans le cabinet de M. Velasquez les actuels ministres des Affaires étrangères, de l'Economie, des Mines ou de la Santé notamment conservent leurs portefeuilles. Par contre, les ministres de l'Intérieur et de la Défense paient sans doute la débâcle des heurts avec les Indiens qui avaient causé 34 morts en juin.

Le Parti nationaliste (gauche) du populiste Ollanta Humala, rival de Garcia en 2005 et sans doute candidat en 2011, a estimé que le nouveau gouvernement «ne représente pas le changement de cap économique dont a besoin le pays».

Avec 67% de mécontents, selon les sondages, Garcia connait une impopularité quasi-record depuis 2006. Le Pérou, modèle de réussite économique récent (+ 9,84% de PIB en 2008) a été stoppé net en avril, avec sa première croissance négative (-2,1%) en 93 mois, et plus de 226 conflits sociaux d'ampleur diverse en cours.

Il paye le traumatisme laissé par la crise indienne qui, née d'un conflit socio-économique sur l'exploitation de l'Amazonie, dérapa les 5 et 6 juin à Bagua (nord) en affrontements entre police et indiens qui firent 34 morts et constituent les pires violences au Pérou depuis près de 20 ans.

Un défi majeur de Velasquez sera d'ailleurs d'honorer les engagements pris par Yehude Simon notamment vis à vis des Indiens d'Amazonie et de poursuivre la concertation entamée ces dernières semaines.

«Je ne laisse pas de bombe à retardement», a affirmé Simon à la veille de son départ.