Manuel Zelaya n'a pas encore réussi son pari: le président déchu du Honduras n'a pu débarquer dimanche à Tegucigalpa, où l'armée l'a empêché de se poser, obligeant son appareil à se détourner vers le Nicaragua.

Les soldats ont obstrué la piste de l'aéroport de la capitale hondurienne avec des véhicules, après avoir tiré sur les partisans de M. Zelaya qui tentaient de forcer leurs barrages, faisant deux morts et deux blessés.

Le dirigeant destitué a expliqué que ses pilotes ont également été avertis qu'ils allaient «être interceptés par des avions des Forces aériennes» s'ils persistaient à vouloir atterrir.

«Si j'avais eu un parachute, j'aurais sauté de cet avion», a-t-il affirmé dans un entretien à la chaîne internationale Telesur, confirmant qu'il voulait «rentrer au pays». «Si ce n'est pas possible maintenant, nous le ferons demain ou plus tard», a-t-il insisté.

Les partisans du président destitué, 30.000 environ selon les estimations de l'AFP, se sont retirés des abords de l'aéroport quand son avion s'est définitivement éloigné.

M. Zelaya avait bravé ses adversaires qui l'ont exilé il y a une semaine en «ordonnant» à l'armée de lui ouvrir l'aéroport, puissamment gardé par un dispositif militaire. Il était menacé d'une «arrestation immédiate» à son arrivée.

Pendant le voyage de M. Zelaya, les nouvelles autorités du Honduras ont proposé un «dialogue de bonne foi» à l'Organisation des Etats américains (OEA), qui les avait exclues de ses rangs dans la nuit.

Roberto Micheletti, le nouveau chef de l'Etat désigné, a également dénoncé des mouvements de troupes au Nicaragua en direction de la frontière commune. Des accusations immédiatement rejetées par le président nicaraguayen Daniel Ortega.

M. Zelaya a précisé qu'il allait rejoindre «des présidents alliés», qui l'attendent au Salvador, où sont arrivés dans l'après-midi les chefs d'Etat de l'Equateur et de l'Argentine, Rafael Correa et Cristina Kirchner, en compagnie du secrétaire général de l'OEA, Jose Miguel Insulza.

«A partir de demain (lundi), la responsabilité revient aux grandes puissances, notamment les Etats-Unis» pour prendre «des actions immédiates contre ce régime putschiste», a encore affirmé M. Zelaya.

Le président vénézuélien Hugo Chavez avait quant à lui rappelé dimanche aux autorités du Honduras qu'elles seraient tenues pour «responsables devant le monde entier» de la sécurité du dirigeant destitué lors de son retour au pays.

Chef de file de la gauche anti-libérale dans la région, il demandé à son homologue américain Barack Obama de «clarifier» la position de son gouvernement, disant craindre que le coup d'Etat soit «soutenu par l'impérialisme yankee».

Au pouvoir depuis 2006, M. Zelaya avait été renversé pour avoir tenté d'organiser une consultation populaire sur la possibilité de briguer un second mandat, démarche déclarée illégale par la Cour suprême.

A Tegucigalpa, les nouvelles autorités, qui s'obstinent à empêcher son retour, sont plus que jamais isolées sur la scène internationale.

Condamnés par l'ONU, l'OEA et l'Union européenne, les adversaires de M. Zelaya ont automatiquement été privés de l'essentiel des financements internationaux indispensables à leur pays, où 70% de la population vit sous le seuil de pauvreté.

Le maintien en place des autorités «dépendra largement de la réaction de la communauté internationale, elles ne peuvent pas résister à de véritables sanctions économiques», a déclaré à l'AFP Mark Weisbrot, co-directeur du Centre de recherche économique et politique de Washington.