Il y a un an, Fidel Castro renonçait au pouvoir mais pas à la parole à Cuba, où sa voix résonne toujours très fort, pesant sur l'évolution d'un régime dont il demeure le gardien inflexible, malgré sa maladie.

Le 19 février 2008, il fit officiellement savoir qu'il n'acceptait plus «la charge de Président du Conseil d'Etat ni de Commandant en chef», après un demi-siècle de règne en forme de défi aux Etats-Unis, son ennemi déclaré.

Les Cubains ont confirmation qu'ils ne reverront plus le «lider maximo» qui, terrassé par une hémorragie intestinale, a cédé les rênes du pouvoir après une opération chirurgicale en juillet 2006, date de sa dernière apparition en public.

Depuis sa retraite près de la capitale, un lieu tenu aussi secret que son état de santé, l'ancien président de 82 ans, qui s'impose exercice, diète et lecture, poursuit ses abondantes «Réflexions», relayées par la presse officielle.

«J'écris car je continue à lutter», souligne-t-il, alors que sa posture orthodoxe paraît parfois à contresens des «réformes» impulsées par son frère Raul, de cinq ans son cadet, à qui il a confié le pouvoir.

La convalescence ne l'empêche pas de recevoir des dignitaires étrangers, notamment les chefs d'Etat chinois Hu Jintao et russe Dmitri Medveded ou son allié vénézuélien Hugo Chavez, dont il estime l'avenir «inséparable» de celui de Cuba.

Ce ballet diplomatique permet aux autorités cubaines de repousser des rumeurs alarmantes sur la santé de Fidel Castro, promptes à ressurgir, en distillant quelques photos, où il apparaît en survêtement, le visage émacié.

Contrôle-t-il encore le régime d'une main de fer ? Les spéculations vont bon train à Cuba, où la dissidence estime encore à 205 le nombre de «détenus politiques».

«Fidel reste le symbole du pouvoir réel. Il continue de l'exercer et bafouer les droits fondamentaux», affirme Elizardo Sanchez, chef de la Commission pour les droits de l'Homme et la réconciliation nationale, organisation illégale mais tolérée.

Grand absent au cinquantenaire de la Révolution de 1959, célébré début janvier dans l'île communiste, Fidel Castro s'engage à ce moment-là à réfréner sa plume, afin de «ne pas gêner» ses compagnons.

Vaine promesse : il prend soin de narguer «son» onzième président américain Barack Obama et l'accuse d'avoir perdu sa «virginité», après avoir loué sa «sincérité», éloignant la perspective d'une levée de l'embargo imposé depuis 1962 par Washington à Cuba.

Ancien guérillero dans la Sierra Maestra, Mario Hernandez Calero, 73 ans, se réjouit de cette pugnacité, assurant que «la Révolution de Fidel va durer encore mille ans».

Même si le fondateur du régime castriste évoque une mort peut-être prochaine, son héritage n'est pas près de s'éteindre à Cuba, où son nom reste omniprésent.

Dans une école primaire de la vieille Havane, Zora Fernandez, 66 ans, enseigne à ses élèves que «Fidel ne sera jamais à la retraite car il fait partie de la Révolution».

«C'est celui qui a porté le peuple cubain», «Cuba est libre grâce à lui», récite un groupe d'écolières en blouse blanche.

D'autres habitants lui reprochent en revanche de «s'accrocher au pouvoir par caprice», comme ce commerçant de 42 ans, qui peste contre un salaire mensuel moyen de 18 dollars.

«Au début, tout le monde applaudissait Fidel. Il nous a apporté la santé et l'éducation. Mais maintenant, il doit vraiment laisser la place, autoriser la liberté d'expression et ouvrir l'économie», réclame-t-il.