(Lagos) L’attaque par des hommes armés dimanche d’une église catholique durant la messe a fait au moins 21 morts et une quarantaine de blessés, dont des enfants, dans le sud-ouest du Nigeria, suscitant l’effroi dans le pays le plus peuplé d’Afrique.

Elle s’est produite pendant la célébration de la Pentecôte à l’église catholique Saint-Francis de la ville d’Owo, dans l’État d’Ondo, habituellement épargné par les djihadistes et les bandes criminelles actifs dans d’autres régions du pays.

Lundi matin, d’immenses tâches de sang maculaient toujours le carrelage de l’église, ses murs et bancs en bois, témoignant de la violence de ce massacre. Des restes humains jonchaient encore le sol.

Photo Sunday Alamba, Associated Press

Des effets personnels ont été abandonnés sur un banc lors de l’attaque.

Selon les premières investigations de la police, des hommes armés ont envahi l’église en fin de matinée avec des armes et vraisemblablement des explosifs.

Les enquêteurs ont ensuite retrouvé sur les lieux du massacre des balles de Kalachnikov, et des fragments d’engins explosifs improvisés (IED), selon un communiqué de la police publié lundi soir sur Twitter.  

Trois engins explosifs improvisés non explosés ont aussi été retrouvés.

« Déguisés en fidèles »

« Certains des hommes armés s’étaient déguisés en fidèles », a précisé la police, ajoutant que d’autres assaillants s’étaient positionnés autour de l’église tirant sur l’édifice depuis différentes directions.  

Une quarantaine de blessés sont actuellement soignés dans plusieurs centres médicaux de la ville. Le vice-président du Nigeria est arrivé en début d’après-midi à Owo, pour leur rendre visite.

Photo Sunday Alamba, Associated Press

Une femme blessée est traitée à l’hôpital Saint-Louis, à Owo.

Aux proches des victimes, il a assuré que les responsables de la tuerie « seront retrouvés, qu’ils paieront pour les conséquences de cet atroce crime ».

Des témoins et survivants de la tuerie ont raconté à l’AFP la panique qui s’est emparée des fidèles au moment où une explosion s’est produite dans l’église, suivie par des coups de feu.

« J’ai couru jusqu’à l’église et j’ai vu mes deux enfants et nous les avons amenés ici au centre médical fédéral », a déclaré Nzeadu Paulinus depuis l’hôpital où ses enfants de 8 et 12 ans reçoivent des soins.  

« Ici, j’ai vu tant de personnes qui étaient blessées, et les morts », ajoute-t-il.

Photo TEMILADE ADELAJA, REUTERS

Cette attaque, dénoncée la vieille comme un « meurtre odieux de fidèles » par le président Muhammadu Buhari,  n’a pas été revendiquée. Les autorités locales ont affirmé que les forces de sécurité avaient été mobilisées pour retrouver les assaillants, dont l’identité n’est pas connue.

Après une première condamnation dimanche soir, le pape François a de nouveau réagi lundi soir se disant « profondément attristé » par cette « horrible attaque », dans un télégramme adressé à l’évêque d’Ondo.  

Insécurité généralisée

L’attaque est survenue à l’avant-veille du lancement par l’APC, le parti au pouvoir, de ses primaires en vue de l’élection présidentielle de 2023 pour choisir son candidat.  

Le président Buhari, un ancien général de l’armée, termine son deuxième mandat sous le feu des critiques alors que le pays fait face à une insécurité généralisée.  

« Cette attaque brutale témoigne d’un mépris total pour le droit à la vie », a dénoncé sur Twitter l’ONG Amnistie internationale au Nigeria.  

« Le Nigeria a le devoir de protéger le droit à la vie de sa population en toutes circonstances », a accusé l’ONG.  

Les attaques contre les sites religieux sont particulièrement sensibles au Nigeria, où les tensions s’exacerbent souvent entre les communautés d’un pays dont le sud-est majoritairement chrétien et le nord majoritairement musulman.

Ce type d’attaque est toutefois rare dans le sud-ouest du pays, relativement paisible, même si des groupes criminels y pratiquent occasionnellement des enlèvements.

Le massacre de dimanche a ainsi suscité l’effroi au Nigeria, les messages de soutien aux victimes ont afflué, notamment sur les réseaux sociaux.  

Sur Twitter par exemple, la superstar de la musique nigériane Burna Boy a présenté lundi matin « ses sincères condoléances à tous ceux qui ont perdu des amis ou des proches dans des actes terroristes ces derniers mois à travers le pays ».   

« Plus rien n’est donc sacré ? Des mères, des pères, des enfants et des bébés se font tuer », a-t-il tweeté.

L’armée nigériane est confrontée à de nombreux foyers d’insécurité dans le reste du pays. Une insurrection djihadiste fait rage depuis 12 ans dans le Nord-Est, qui a fait plus de 40 000 morts et 2 millions de déplacés. Les gangs de pilleurs et de kidnappeurs terrorisent le Nord-Ouest et centre, et le Sud-Est est le théâtre de mouvements séparatistes.