(Kananga) Un procès en appel aura lieu et « les enquêtes vont se poursuivre », a assuré le parquet militaire lundi à Kananga (centre de la RDC), après les condamnations prononcées samedi dans le procès du meurtre de deux experts américain et suédoise de l’ONU en 2017.

La cour militaire de Kananga, chef-lieu de la province du Kasaï central, a prononcé samedi 51 condamnations à mort, principalement contre d’anciens miliciens, une peine de 10 ans de prison contre un colonel et deux acquittements, à l’issue d’un procès de plus de quatre ans qui n’a pas répondu à toutes les questions sur l’assassinat des deux experts.

En RDC, la peine de mort est régulièrement prononcée, mais n’est plus appliquée depuis un moratoire décidé en 2003 et systématiquement commuée en condamnation à perpétuité.

Michael Sharp, de nationalité américaine, et Zaida Catalan, suédoise, avaient disparu le 12 mars 2017, alors qu’ils étaient au Kasaï pour enquêter sur des fosses communes liées au conflit armé qui avait éclaté après la mort du chef coutumier Kamuina Nsapu, tué par les forces de sécurité. Leurs corps avaient été retrouvés deux semaines après.

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Michael Sharp, de nationalité américaine, et Zaida Catalan, suédoise, avaient disparu le 12 mars 2017, alors qu’ils étaient au Kasaï pour enquêter sur des fosses communes liées à un conflit armé.

Selon la version officielle, ils ont été exécutés par des miliciens de la secte Kamuina Nsapu. Mais en juin 2017, un rapport remis au Conseil de sécurité de l’ONU estimait que ce double meurtre était un « guet-apens prémédité » et n’excluait pas l’implication de membres de la sécurité d’État.

Durant le procès, il a été avancé que les miliciens avaient tué les experts pour se venger de l’ONU, à qui ils reprochaient de ne pas avoir empêché l’armée de les attaquer. Mais les débats n’ont pas identifié d’éventuels commanditaires.

« Il reste encore plus de questions que de réponses », a notamment réagi sur Twitter après le verdict Thomas Fessy, chercheur sur le Congo pour Human Rights Watch, en déplorant que la cour « n’ait pas remonté plus haut dans la chaîne de commandement, négligeant la responsabilité de l’État ».

Dans une déclaration lue lundi devant la presse à Kananga, le colonel Jean Blaise Buamulundu, « auditeur (procureur) militaire supérieur », a annoncé que le ministère public, « en conformité avec une exigence légale » et bien qu’ayant lui-même requis au procès plus de 50 peines de mort, allait faire appel des peines capitales prononcées.

Il a également souligné que « la plupart des condamnés » avaient manifesté l’intention de faire appel et, par conséquent, tous les condamnés ont été acheminés dès dimanche à Kinshasa, où se trouve le siège de la haute cour militaire, a-t-il précisé.

Parmi les condamnés à mort, une vingtaine sont en fuite et ont été jugés par défaut. « Les enquêtes vont se poursuivre à l’encontre de ceux qui se cachent », a assuré le colonel Buamulundu.