(Mogadiscio) Le gouvernement somalien a annoncé jeudi la tenue « d’ici 60 jours » des élections nationales, dont le report avait provoqué l’une des pires crises politiques de ces dernières années dans ce pays de la Corne de l’Afrique.  

Mi-avril, la prolongation pour deux ans du mandat du président Mohamed Abdullahi Mohamed, dit Farmajo, expiré le 8 février sans que des élections aient pu être organisées, avait mené à de violents affrontements à Mogadiscio.

Cette crise a rompu le fragile équilibre sécuritaire et réveillé les souvenirs de la guerre civile, des soldats désertant leur poste dans les zones rurales pour venir combattre auprès de leur leader politique dans la capitale.  

Début mai, dans un geste d’apaisement, Farmajo a finalement chargé le premier ministre, Mohamed Hussein Roble, d’organiser des élections dans les meilleurs délais.  

Ce dernier a appelé à la tenue d’une réunion entre tous les responsables politiques. Ouverte samedi, à huis clos, elle s’est achevée jeudi avec une cérémonie officielle et la lecture d’un communiqué résumant les principaux points de l’accord conclu entre les dirigeants.  

« Le forum consultatif national s’est mis d’accord sur le fait que les élections se tiendront d’ici 60 jours », a déclaré Abdirahman Yusuf, ministre adjoint de l’Information, lisant ce communiqué.

M. Yusuf a ajouté que les dates exactes seraient déterminées par le comité chargé de l’organisation des élections, le FEIT.  

Dans un discours, le premier ministre a évoqué « un jour historique », affirmant que les discussions ont été empreintes de « respect, de patience et de compromis ».  

« Je suis engagé à superviser de manière juste le processus pour des élections justes et inclusives et j’appelle les parties à pardonner et à ouvrir leur cœur à l’autre », a déclaré M. Roble.  

De son côté, le président Farmajo a évoqué une « victoire pour tous les Somaliens, partout ».

Ce scrutin va conserver le complexe système électoral indirect utilisé par le passé en Somalie, où des délégués spéciaux investis par une myriade de clans et de sous-clans choisissent les parlementaires, qui eux-mêmes désignent le président.  

Les Nations unies ont par le passé estimé que l’adoption d’un système direct « une personne, une voix » serait essentiel pour la démocratisation de la Somalie après des décennies de chaos et d’instabilité.

Mais le pays, rongé par les luttes politiques intestines, par les problèmes logistiques et par l’insurrection de la milice islamiste shebab, ne parvient pas à atteindre cet objectif.  

« Issue heureuse »

Le gouvernement et les cinq États semi-autonomes du pays avaient conclu le 17 septembre un accord prévoyant l’organisation d’élections avant la fin du mandat de Farmajo selon ce système indirect, rendu cependant plus représentatif grâce à l’augmentation du nombre de délégués.

Mais le processus n’avait pas abouti, le gouvernement fédéral et les dirigeants des États du Puntland et du Jubaland ne parvenant pas à s’entendre sur l’organisation du scrutin.

Parmi les points de contentieux discutés figurent la composition des comités électoraux ainsi que la tenue du vote à Gedo, dans le sud-ouest de la Somalie, à la frontière avec le Kenya, une zone du Jubaland qui fut récemment le théâtre de combats meurtriers entre troupes nationales et locales.

Dans un communiqué, la Mission de l’ONU en Somalie (Manusom, ou Unsom en anglais) a salué « l’issue heureuse » du sommet qui s’est achevé jeudi.  

« Nous appelons maintenant toutes les parties à avancer promptement pour organiser sans délai des élections inclusives et transparentes », écrit-elle.

« Les partenaires internationaux se tiennent prêts à soutenir les dirigeants somaliens pour mettre en œuvre cet accord historique », ajoute-t-elle.

En 2017, l’élection du président Farmajo avait suscité beaucoup d’espoir dans la population, qui voyait en lui un dirigeant soucieux de lutter contre la corruption et déterminé à combattre les shebab.

Mais la prolongation de son mandat a été perçue par beaucoup comme un passage en force pour se maintenir au pouvoir et, entre autres problèmes, les shebab n’ont pas été particulièrement inquiétés pendant son mandat.

Le gouvernement de Mogadiscio ne contrôle toujours qu’une faible portion du territoire national, avec l’aide cruciale des quelque 20 000 hommes de la force de l’Union africaine (UA), l’Amisom, qui agit sous mandat de l’ONU.