(Rome) Le corps de l’ambassadeur italien et celui de son garde du corps tués dans l’est de la République démocratique du Congo sont arrivés mardi soir à Rome, au lendemain de l’attaque attribuée par Kinshasa à des rebelles hutus rwandais qui démentent toute implication.

Un avion militaire, un Boeing 767, parti de l’aéroport de Goma, la capitale du Nord-Kivu, a atterri peu après 23 h à l’aéroport de Ciampino, près de la capitale italienne, avec à son bord les corps du diplomate et du jeune carabinier dans des cercueils drapés du drapeau vert-blanc-rouge, selon la télévision publique Rai et l’agence de presse Ansa.

Le premier ministre Mario Draghi, le chef de la diplomatie Luigi Di Maio ainsi que le ministre de la Défense Lorenzo Guerini se sont rendus à Ciampino pour accueillir l’épouse de l’ambassadeur et leurs trois filles, également présentes à bord de l’appareil.

L’ambassadeur Luca Attanasio, 43 ans, est décédé après avoir été blessé par balles lorsque le convoi du Programme alimentaire mondial (PAM) dans lequel il circulait a été pris dans une embuscade dans la province du Nord-Kivu (Est), près de la frontière avec le Rwanda. Son garde du corps italien Vittorio Iacovacci et un chauffeur congolais du PAM, Moustapha Milambo, ont aussi été tués.

À Kinshasa, le président congolais Félix Tshisekedi et son épouse Denise Nyakeru Tshisekedi se sont rendus à la résidence de l’ambassadeur pour « une visite de consolation » à sa veuve et aux jeunes orphelines.

À Rome, le pape François a souligné « les qualités humaines et chrétiennes » de l’ambassadeur et a salué la mémoire des deux Italiens, « serviteurs de la paix et du droit ».

Frontière rwandaise

Le Nord-Kivu est considéré comme l’une des zones les plus dangereuses de RDC, à la lisière du parc national des Virunga. Mais selon des responsables humanitaires, la route sur laquelle circulait le convoi ne nécessitait pas d’escorte.

Les autorités congolaises ont accusé lundi les rebelles hutus rwandais des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), installées dans l’est de la RDC, d’être responsables de l’attaque, qualifiée de « terroriste » par le président Tshisekedi.

Mais dans un communiqué parvenu mardi à l’AFP, les rebelles des FDLR ont nié être impliqués : ils « demandent aux autorités congolaises et à la Monusco (Mission de l’ONU en RDC) de faire toute la lumière sur les responsabilités de cet ignoble assassinat au lieu de recourir à des accusations hâtives ».

Les rebelles rwandais affirment que « le convoi de l’ambassadeur a été attaqué dans une zone dite “des trois antennes”, près de Goma, sur la frontière avec le Rwanda, non loin d’une position des FARDC (Forces armées de la RDC) et des […] Forces rwandaises de Défense » (armée rwandaise).

« Les responsabilités de cet ignoble assassinat (sont) à rechercher dans les rangs de ces deux armées », accusent les rebelles.

Les FDLR, créées au début des années 2000 pour lutter contre le régime de Kigali, sont l’un des nombreux redoutables groupes armés qui menacent au quotidien les civils dans l’est de la RDC. Certains des fondateurs des FDLR ont participé au génocide des Tutsis en avril-juillet 1994 au Rwanda, avant de se réfugier dans l’est de la RDC, déstabilisant durablement la région.

Selon un expert du Baromètre sécuritaire du Kivu (KST), « les FDLR sont à proximité du lieu où l’attaque a eu lieu. Ça relève du domaine du possible que ces rebelles rwandais soient responsables de cette attaque », a-t-il déclaré à l’AFP.

AK-47 et machette

L’attaque du convoi dans lequel circulait l’ambassadeur a eu lieu sur la route nationale 2 qui longe de très près la frontière rwandaise, dans une zone de forêt dense et montagneuse, où les frontières ne sont pas étanches.

Les autorités congolaises et rwandaises nient systématiquement toute présence de troupes rwandaises sur le territoire de la RDC.

Selon la présidence congolaise, le convoi est tombé dans une embuscade à 3 kilomètres de sa destination, la commune de Kiwanja, dans le territoire de Rutshuru, lorsque « les assaillants, au nombre de six, munis de cinq armes de type AK-47 ainsi que d’une machette » ont fait irruption.

« Ils ont procédé à des tirs de sommation avant d’obliger les occupants des véhicules à descendre et à les suivre dans le fin fond du parc (des Virunga) et ce, après avoir abattu l’un des chauffeurs afin de créer la panique », ajoute la présidence.

Alertés, les rangers et les militaires congolais présents dans les environs se sont mis à la poursuite des assaillants. « À 500 mètres (du lieu de l’attaque), les ravisseurs ont tiré à bout portant sur le garde du corps (italien), décédé sur place, et sur l’ambassadeur, le blessant à l’abdomen ».

Selon un communiqué du PAM, Rocco Leone, directeur adjoint de cette agence pour la RDC, se trouvait également dans le convoi attaqué.