(Lusaka) La Zambie s’est réveillée lundi avec un nouveau président, l’opposant de toujours Hakainde Hichilema, très largement élu avec près d’un million de voix d’avance et une forte participation, son prédécesseur promettant une « transition pacifique du pouvoir ».

L’infatigable homme d’affaires de 59 ans, qui se présentait pour la sixième fois à la présidentielle, a salué « un moment historique que des millions de Zambiens attendaient ».

Surnommé « HH » mais aussi « Bally », terme affectueux pour désigner un père ou un aîné, M. Hichilema, front haut et sourcils broussailleux, s’est adressé au pays en direct depuis sa maison d’un quartier résidentiel de la capitale Lusaka.

Il a salué la jeunesse, fortement mobilisée, les moins de 35 ans représentant la majorité des sept millions d’inscrits dans le pays d’Afrique australe qui compte une population de 17 millions : « Cette victoire n’appartient pas à HH, à Bally » mais « aux hommes et aux femmes de Zambie, en particulier aux jeunes ».

« Les attentes des gens sont fortes », a noté celui qui a promis de redresser l’économie du pays endetté et plombé par une forte inflation.  

Debout derrière un pupitre, costume chic sur chemise à col ouvert, dégageant à la fois une image de sérieux et de décontraction, il a été submergé par l’émotion au moment de prendre la parole, retirant son masque et s’essuyant les yeux : « C’est avec honneur, humilité et gratitude que je me tiens devant vous pour dire que le changement est là ».

Peu avant, le président sortant avait concédé sa défaite et salué la victoire de son rival historique. « Je veux féliciter mon frère, Hakainde Hichilema, président désigné, qui devient le septième président de la république » de Zambie, a déclaré Edgar Lungu, à la tête du pays depuis six ans.

À Lusaka lundi matin, militants et simples citoyens ont grimpé sur des poteaux ou se sont garés sur le bord des avenues pour arracher des affiches de campagne du président sortant, à dominante verte, la couleur de son parti, a constaté l’AFP.

Une « démocratie meilleure »

Après avoir suscité quelques inquiétudes, en contestant samedi soir les conditions inéquitables selon lui du scrutin dans trois provinces, M. Lungu a promis lundi de se conformer à la Constitution pour permettre « une transition pacifique du pouvoir ».

« HH », qui a promis d’être le président de tous les Zambiens, n’a pas manqué de dénoncer « le régime brutal » sortant et promis une « démocratie meilleure ».

Lungu, avocat de formation, s’était montré de plus en plus inflexible à l’égard de toute opposition ou voix critique, faisant fermer des médias indépendants et arrêter des figures d’opposition. Hichilema lui-même assure avoir été arrêté une quinzaine de fois depuis qu’il fait de la politique.

« HH » a reçu près d’un million de voix de plus que M. Lungu, avait annoncé dans la nuit la commission électorale, soulignant une forte participation à près de 71 %.

Lors du scrutin de jeudi, certains bureaux de vote avaient dû fermer leurs portes à cinq heures du matin pour permettre à tous les électeurs, placés dans la queue avant l’heure limite de 18 heures, de voter.

Dans un communiqué du département d’État, les États-Unis ont félicité Hichilema et salué l’élection comme « un hommage aux idéaux démocratiques sur lesquels le pays a été fondé et une inspiration pour les aspirations démocratiques des peuples du monde entier ».  

Le président du Botswana, Mokgweetsi Masisi, a vu dans le scrutin « des leçons essentielles pour la région et le continent africain dans son ensemble. »

Arrivé au pouvoir en 2015, après la mort du président précédent, M. Lungu a affirmé avoir « cherché à servir (son) pays du meilleur que j’ai pu », à l’issue d’une campagne très critique de sa gestion économique notamment.

Les difficultés économiques et l’inflation dans ce pays riche en cuivre, qui a été le premier du continent à avoir fait défaut sur sa dette depuis le début de la pandémie, avaient entaché la popularité de M. Lungu, avaient souligné les sondeurs ces derniers mois.  

L’homme autoritaire, grand et mince, au sourire reconnaissable à ses dents du bonheur, a été souvent critiqué pour avoir emprunté de façon déraisonnable, notamment auprès de créanciers chinois, pour financer une frénésie de projets d’infrastructures.