Des combattants de Boko Haram ont pris cette fin de semaine une importante base militaire au terme d'affrontements musclés et tendu une embuscade à des soldats dans deux attaques témoignant de l'emprise des djihadistes dans le nord-est du Nigeria.

Samedi soir, les insurgés ont envahi une base militaire forte de plus de 700 soldats dans l'État de Yobe, région frontalière du Niger, où une centaine de jeunes filles avaient été enlevées plus tôt cette année.

Il s'agit de la deuxième attaque d'envergure en deux jours des djihadistes affiliés à l'organisation État islamique contre les forces nigérianes dans le nord-est du pays, région pourtant entrée dans une « phase de stabilisation post-conflit », selon le président Muhammadu Buhari.

Samedi, « les terroristes de Boko Haram ont attaqué les troupes de la 81e division avancée dans le village de Jilli du district de Geidam. Les terroristes, nombreux, ont lancé l'assaut vers 14 h 30 et ont pris le contrôle de la base après de durs combats », a déclaré à l'Agence France-Presse (AFP) une source militaire.

Le commandant de la base et 63 soldats ont pris la fuite pour trouver refuge à Geidam, un chef-lieu situé à une soixantaine de kilomètres, où sont attendus les 670 autres militaires en poste dans la garnison attaquée, a indiqué cette source.

« Nous ne savons pas s'il y a des victimes parmi les soldats, nous le saurons plus tard », a souligné ce responsable, précisant que la base attaquée était nouvelle et que les soldats y avaient été récemment déployés de Lagos, la vaste métropole de ce pays de 190 millions d'habitants.

Un chef d'une milice locale a attribué l'attaque de la base militaire à la faction Abou Musab Al-Barnawi de Boko Haram, qui cible notamment les forces nigérianes. « Nous avons appris que les assaillants ont conduit depuis le Lac Tchad et traversé Gubio avant d'attaquer la base », a-t-il soutenu.

« On nous a appris que les soldats ont été supplantés par des centaines de combattants de Boko Haram », a dit Fannami Gana, un habitant de Geidam, où les soldats nigérians rescapés se sont répliés.

Embuscade

Vingt-trois soldats nigérians sont toujours portés disparus après être tombés vendredi dans une embuscade de Boko Haram dans l'État voisin de Borno. « Une centaine de terroristes » avaient participé à cette attaque qui a en outre permis aux insurgés de faire main basse sur des véhicules de l'armée, selon une source militaire.

L'ampleur et la sophistication des attaques de Boko Haram témoignent de la menace que fait peser ce groupe armé sur le nord du pays, mais révèlent peut-être aussi des tensions au sein même de la nébuleuse jihadiste, selon Yan St-Pierre, de la société Modern Security Consulting basée à Berlin.

Des combattants de Boko Haram tenteraient de s'imposer sur les autres afin de prendre le contrôle de la faction dirigée par Abubaker Shekau, chef historique du groupe tenu pour gravement malade, souligne-t-il.

« Lorsqu'un chef presque mythique est sur la voie de sortie, il y a toujours des combats pour déterminer qui lui succédera », affirme-t-il, ajoutant par ailleurs que Boko Haram pouvait compter sur un afflux de combattants pour « refaire ses forces » quoi qu'en disent les autorités nigérianes.

La recrudescence de la violence a mis la pression sur le président Muhammadu Buhari, qui avait promis d'améliorer la sécurité dans le pays le plus peuplé d'Afrique.

L'insurrection de Boko Haram visant à établir un califat islamique dans le nord du Nigeria a fait au moins 20 000 morts et plus de 2,6 millions de déplacés.