L'opposition sud-africaine a ouvert mardi deux nouveaux fronts pour tenter de précipiter la chute du président Jacob Zuma, mis en cause dans une série de scandales de corruption, d'abord devant la justice puis, sans succès, au Parlement.

Depuis des mois, ses adversaires essaient en vain de faire tomber le chef de l'État, qui doit normalement se retirer en 2019 à l'issue de son second mandat de cinq ans à la tête du pays.

Lors de leur dernière tentative en date, fin août, ils avaient échoué de peu à faire adopter une motion de défiance. Seuls 24 députés leur avaient manqué pour obtenir la démission du président, dont l'autorité est contestée y compris dans son propre parti, le Congrès national africain (ANC) de feu Nelson Mandela.

Le principal parti d'opposition, l'Alliance démocratique (DA), a rouvert les hostilés devant le Parlement mardi en présentant cette fois une motion visant à avancer les élections générales, normalement prévues en 2019.

«Nous devons tout remettre à zéro», a lancé John Steenhuisen, le chef du groupe parlementaire de la DA.

«Nous ne pouvons pas nous permettre de garder ce gouvernement pendant encore deux ans. L'Afrique du Sud mérite un nouveau départ», a insisté M. Steenhuisen, «on ne peut plus faire confiance à l'ANC pour gouverner».

Mais au terme d'un après-midi de débats, la motion, qui n'était pas soutenue par les autres partis hostiles à M. Zuma, a été sans surprise rejetée par 229 voix contre et 83 pour.

L'ANC, qui détient la majorité absolue, avait dénoncé une initiative «frivole». L'un de ses élus, Richard Mdakane, avait accusé la DA de vouloir changer le régime «par des moyens clandestins».

Alliée aux Combattants pour la liberté économique (EFF, gauche radicale), la DA a réussi l'an dernier à arracher à l'ANC le contrôle de plusieurs municipalités comme Johannesburg et Pretoria.

Elle espère désormais profiter des affaires qui affaiblissent le président Zuma pour, en 2019, priver de sa majorité absolue l'ANC, au pouvoir depuis l'avènement de la démocratie en 1994 après la fin du régime d'apartheid.

«Président escroc»

Parallèlement à ce débat, plusieurs partis d'opposition ont défendu mardi devant la Cour constitutionnelle une requête visant à contraindre le Parlement à engager une procédure de destitution contre le président «escroc».

«Nous demandons à la Cour d'ordonner au Parlement d'examiner» si le président doit être destitué ou non, a déclaré devant la plus haute juridiction du pays Tembeka Ngcukaitobi, l'avocat du parti des Combattants pour la liberté économique (EFF).

«Le comportement du président n'a pas été examiné à la loupe», a-t-il fait valoir. «Ce que nous demandons, c'est qu'il y ait une enquête sur son comportement» dans le cadre d'une procédure de destitution, a-t-il ajouté en référence à l'attitude du président dans une affaire d'abus de biens sociaux.

Pendant deux ans, M. Zuma a refusé de rembourser l'argent dépensé par le Trésor public pour des travaux de modernisation de sa résidence privée de la province du KwaZulu-Natal (nord-est).

Il en a finalement rendu une partie, soit un demi-million d'euros, après un jugement rendu en 2016 par la Cour constitutionnelle qui l'a reconnu coupable de violation de la loi fondamentale.

La Cour a mis son jugement en délibéré à une date non précisée.

Une majorité des deux tiers des députés est requise pour destituer le chef de l'État. Or le président Zuma a jusqu'à présent survécu à plusieurs motions de défiance qui, elles, nécessitent seulement la majorité absolue.

M. Zuma est cependant sorti affaibli de l'échec, en août, de la dernière motion présentée par l'opposition: une trentaine de députés de l'ANC avaient voté en faveur de la motion, illustrant les divisions entre pro et anti-Zuma au sein du parti au pouvoir.

Certains au sein de l'ANC craignent que les déboires du président ne coûtent cher à leur parti en 2019.

M. Zuma est notamment sous la menace de la réouverture de 783 charges de corruption dans une vieille affaire de contrat d'armement. Il est aussi soupçonné de collusion avec une richissime famille d'hommes d'affaires, les Gupta, qui ont obtenu de juteux contrats avec des entreprises publiques.