Les premiers soldats tchadiens d'un contingent de 2000 hommes sont arrivés mercredi au Niger pour prêter une nouvelle fois main-forte à leur voisin, cible vendredi d'une attaque massive et meurtrière des islamistes nigérians de Boko Haram contre la ville de Bosso.

«Les premiers soldats tchadiens, à bord d'une trentaine de véhicules tout-terrain lourdement armés, sont déjà arrivés à Bosso. Ils ont traversé la frontière (tchado-nigérienne) vers 16h30 locales», a affirmé une source sécuritaire nigérienne à l'AFP.

Aguerries et habituées au combat contre les djihadistes, les troupes tchadiennes - environ 2000 hommes «lourdement équipés» - «empruntent visiblement la route de N'guigmi», contournant le lac Tchad par le Nord, a poursuivi cette source.

Selon une source militaire tchadienne à N'Djamena, les soldats ont pour mission de «traquer partout les Boko Haram» dans une zone que l'armée tchadienne connaît bien, pour avoir déja porté secours au Niger à plusieurs reprises, notamment à Bosso, en 2015.

L'attaque à Bosso, proche de la frontière nigériane, est une des plus meurtrières menées par Boko Haram au Niger depuis que ce pays est officiellement entré en guerre contre ces insurgés en février 2015.

Selon les autorités nigériennes, le bilan de l'attaque est de 26 morts «côté ami» (24 soldats nigériens et deux miliaires nigérians) et de 55 morts du côté de Boko Haram.

Mardi, des témoins près de Bosso assuraient que le groupe occupait encore la petite ville alors que le gouvernement nigérien avait assuré lundi que «Bosso était totalement sous contrôle».

À Diffa, capitale régionale située à 140 km à l'ouest, un enseignant, Ari Issa, a affirmé à l'AFP avoir observé un «balai aérien d'avions de chasse».

«Les avions militaires vont et viennent entre la zone du Lac Tchad et l'aéroport de Diffa», a confirmé la radio privée Anfani.

L'information n'a pu être confirmée par l'armée tchadienne.

À Diffa, la population craint une progression de Boko Haram. «Les gares sont noires de monde, notamment des femmes et des enfants qui veulent à tout prix quitter la zone», a témoigné mercredi un chauffeur d'une compagnie de transport de Diffa.

Quelque 50 000 personnes ont fui la zone après l'attaque et la situation humanitaire est dramatique, selon l'organisation Médecins sans Frontières (MSF).

«On a des témoignages sur des gens qui sont morts de soif et de faim mais on n'a pas encore de preuves. Les gens ont fui à pied (...) Le climat est très hostile (sec et chaud). Il y a des enfants, des vieillards, des femmes...», a déclaré mercredi à l'AFP Elmounzer Ag Jiddou, chef de mission de MSF au Niger.

«S'il n'y a pas une action (humanitaire) forte, on pourra déplorer beaucoup de morts de faim et de soif», a-t-il résumé.

Soutiens français et américains

Les pays riverains du lac Tchad (Nigeria, Tchad, Niger, Cameroun) auxquels s'est joint le Bénin, ont formé une force régionale contre ces islamistes nigérians, qui ont prêté allégeance en mars 2015 à l'organisation État islamique (EI).

Dès samedi, le président tchadien Idriss Déby s'est rendu à Bol, sur les rives du lac Tchad, pour «donner les consignes» à l'armée tchadienne, selon une source militaire tchadienne.

Mardi, le président nigérien Mahamadou Issoufou a fait une brève visite à N'Djamena pour s'entretenir avec M. Déby, en première ligne de la lutte contre les groupes djihadistes en Afrique subsaharienne.

En 2015, l'armée tchadienne est déjà intervenue au Cameroun, au Nigeria et au Niger pour contrer l'avancée territoriale de Boko Haram.

Les armées de la région ont infligé de sérieux revers aux islamistes, contraints d'abandonner certains de leurs bastions nigérians.

Mais le groupe a continué de multiplier les attentats-suicide meurtriers et s'est retranché dans des zones difficiles d'accès, comme les îles du lac Tchad, ou la forêt de Sambisa, à la frontière camerouno-nigériane.

À la mi-mai, lors d'un sommet à Abuja, le président français François Hollande avait jugé que les résultats de la lutte contre Boko Haram étaient «impressionnants» mais qu'il fallait faire «davantage» pour aider les pays de la région, promettant «de soutenir la force» régionale, à travers de l'assistance, de la formation et du renseignement.

La France est très présente militairement au Niger et au Tchad, où est basé l'état-major de la force Barkhane, chargée de traquer les groupes djihadistes saheliens.

Les États-Unis fournissent également une assistance militaire avec des drones basés au Niger et au Cameroun.