Pour la première fois, l'une des 219 lycéennes nigérianes enlevées par Boko Haram à Chibok (nord-est) a été retrouvée saine et sauve, plus de deux ans après avoir été capturée par le groupe islamiste, qui utilise le kidnapping comme une arme et un moyen de recrutement.

Les filles de Chibok sont les victimes les plus tristement célèbres de Boko Haram. Ce kidnapping sans précédent, survenu le 14 avril 2014, avait provoqué une vague d'indignation au Nigeria et dans le monde. Le retour de cette lycéenne est une rare lueur d'espoir dans le calvaire des captives de Chibok.

Depuis 2009, le groupe jihadiste est tenu responsable de l'enlèvement d'au moins 2000 personnes, dans une insurrection qui a fait quelque 20 000 morts.

La lycéenne Amina Ali, qui avait 17 ans lors de son enlèvement, a été secourue mardi dans la zone de la forêt de Sambisa (Etat de Borno), connue pour être le bastion de Boko Haram.

Sur une photographie fournie par l'armée nigériane, on peut voir une jeune femme hébétée, assise sur une chaise en plastique, portant un long hijab de couleur claire, un pagne rose et de simples tongs. Elle porte d'une main un bébé, présenté comme sa fillette de quatre mois, Safiya, et de l'autre un plat de nourriture.

Dans un communiqué mercredi, l'armée nigériane a précisé les circonstances du retour de cette lycéenne.

Des soldats et des villageois membres d'une milice d'autodéfense - qui assistent les militaires nigérians dans la lutte contre Boko Haram - ont été déployés à Baale, près de la ville de Damboa (à 40 km de Chibok), et ont «secouru une Mademoiselle Amina Ali et un terroriste présumé de Boko Haram, Mohammed Hayatu, qui prétend être son mari», indique le porte-parole de l'armée, Sani Usman, dans ce communiqué.

Selon un chef communautaire de Chibok, Ayuba Alamson Chibok, les «milices d'autodéfense de Chibok et Damboa font régulièrement équipe pour patrouiller dans et autour de la forêt de Sambisa où les opérations de l'armée tentent de déloger Boko Haram», a-t-il expliqué à l'AFP.

Des membres de ces milices ont vu mardi une dizaine de personnes semblant fuir autour du village de Kilakesa, près d'une zone où Boko Haram a installé certains de ses camps, selon des témoins. Parmi eux se trouvait une jeune fille, accompagnée d'un bébé et portant un hijab ressemblant, selon eux, à ceux portés par les lycéennes dans de récentes vidéos des captives. Les miliciens, dont la plupart sont des villageois bénévoles et équipés d'armes très rudimentaires, ont stoppé le groupe pour les questionner.

La jeune fille leur a alors dit être l'une des lycéennes et s'appeler Amina. Ensuite, elle a pointé le doigt vers un homme à ses côtés, Mohammed Hayatu, le présentant comme son mari.

«Sanglots»

Amina a d'abord été ramenée à sa mère, Binta Ali, dans sa localité natale de Mbalala, près de Chibok. «La fille et la mère sont tombées dans les bras l'une de l'autre, et la mère a éclaté en sanglots», a rapporté à l'AFP M. Alamson.

Amina et son frère Mai sont les seuls enfants encore vivants de Binta, la soixantaine. Ses onze autres enfants sont tous morts. Le père d'Amina et mari de Binta est par ailleurs décédé de maladie pendant la captivité d'Amina. Des parents et des voisins se sont rapidement réunis pour fêter ces retrouvailles, chantant et manifestant leur joie, selon des témoins contactés par l'AFP.

D'après le porte-parole de l'armée, Amina, Safiya et Mohammed Hayatu ont ensuite été transférés dans la capitale de l'Etat de Borno, Maiduguri (à 50 km de Chibok) notamment pour passer «des examens médicaux».

De son côté, le mouvement BringBackOurGirls assure qu'Amina «a fourni des informations utiles sur le fait que les autres lycéennes étaient toujours retenues captives dans la forêt de Sambisa». Selon l'un des responsables locaux du mouvement, Amina a assuré qu'au moins «six d'entre elles étaient déjà mortes».

En avril 2014, Boko Haram avait enlevé 276 jeunes filles d'une école secondaire de Chibok. 57 d'entre elles avaient réussi à s'échapper dans les heures suivant leur enlèvement par le groupe, dont le nom signifie «l'éducation occidentale est un péché» en haoussa et qui a pour objectif la création d'un État islamique indépendant.

Le patron des opérations humanitaires Stephen O'Brien, en visite à Maiduguri, a déclaré que ce retour avait été accueilli localement comme «une nouvelle formidable», mais rappelé que «des milliers» d'autres personnes restaient aux mains du groupe.

Selon les ONG de défense des droits de l'Homme, plusieurs milliers de femmes et de jeunes filles ont été enlevées depuis le début du conflit. Boko Haram en fait des esclaves sexuelles ou des bombes humaines, tandis que les garçons et les hommes sont enrôlés de force par les rebelles.

Selon les ONG de défense des droits de l'Homme, plusieurs milliers de femmes et de jeunes filles ont été enlevées depuis le début du conflit. Boko Haram en fait des esclaves sexuelles ou des bombes humaines, tandis que les garçons et les hommes sont enrôlés de force par les rebelles.

Les dernières preuves de vie des lycéennes captives dataient d'une vidéo postée par le groupe islamiste en mai 2014, puis d'un message envoyé au gouvernement nigérian début 2016 où l'on pouvait voir 15 jeunes filles portant un long hijab noir, dans une vidéo vraisemblablement enregistrée le 25 décembre dernier.