Un avion transportant les corps d'une partie des victimes de l'écrasement d'un charter russe en Égypte est arrivé lundi à Saint-Pétersbourg, alors que l'enquête sur les causes de la catastrophe et les recherches de corps se poursuivent.

L'appareil qui s'est posé sur l'aéroport de Poulkovo, près de Saint-Pétersbourg, transportait, selon des représentants du ministère russe des Situations d'urgence, les restes de 144 des 224 personnes tuées lorsque l'Airbus russe s'est écrasé dans le désert égyptien du Sinaï.

Dimanche soir, une source aéroportuaire au Caire avait déclaré que l'avion rapatriait 162 corps.

Plusieurs milliers de personnes ont rendu hommage dimanche soir à Saint-Pétersbourg, deuxième ville de Russie, aux 217 passagers et 7 membres d'équipage décédés dans la catastrophe, tous des Russes à l'exception de trois Ukrainiens. Il s'agit de la pire catastrophe aérienne qui ait touché la Russie.

L'Airbus A321-200 de la compagnie charter russe Metrojet qui s'est écrasé samedi à l'aube dans le Sinaï avait décollé de la station balnéaire égyptienne de Charm el-Cheikh à destination de Saint-Pétersbourg.

Les autorités égyptiennes et russes ont déclaré ne pas être pour le moment en mesure d'annoncer les causes de l'écrasement. L'hypothèse d'un attentat reste envisagée par les experts après la revendication de la branche égyptienne du groupe djihadiste Etat islamique (EI), qui a annoncé samedi avoir détruit l'avion en représailles, selon elle, aux bombardements russes en Syrie.

Le chef des experts aéronautiques russes a déclaré que l'avion s'était disloqué «en l'air» pour une raison encore inconnue.

«Les fragments se sont éparpillés sur une grande surface d'environ 20 kilomètres carrés», a déclaré au Caire Viktor Sorotchenko, directeur du Comité intergouvernemental d'aviation (MAK), cité par les agences de presse russes.

Cette dislocation a eu lieu «à haute altitude», a précisé à la télévision russe, depuis l'Égypte, le directeur de l'agence russe chargée du transport aérien, Alexandre Neradko.

Le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi a appelé à attendre les résultats de «la vaste enquête techniquement compliquées» avant «d'évoquer les raisons possibles du drame».

Ballons et colombes 

Sur les lieux de l'écrasement, au milieu de la province du Nord-Sinaï, un journaliste de l'AFP a vu d'innombrables petits débris noircis de l'avion éparpillés sur le sol aride. Ils dégageaient encore une odeur âcre de brûlé plus de 24 heures après le drame.

Aucun corps n'était visible mais des soldats surveillaient une dizaine de sacs noirs, rouges et oranges. Un peu plus loin, une toute petite veste rouge et grise laissait imaginer l'horreur, 17 enfants ayant péri dans l'écrasement dont une fillette de 10 mois.

Des dizaines de sacs de voyage et de valises colorées étaient également entassés les uns sur les autres aux côtés de débris de l'appareil. Ils étaient pour la plupart en bon état.

Un officier de l'armée a assuré à l'AFP dimanche soir que 168 corps avaient été trouvés sur les lieux de l'accident, certains «loin» du principal morceau de carlingue, notamment un à huit kilomètres. Les autorités égyptiennes ont dû élargir à 15 kilomètres le rayon des recherches.

Une journée de deuil national a été observée dimanche en Russie. En hommage aux victimes, plusieurs milliers de personnes ont formé un cercle sur la vaste place du Palais, dans le centre de Saint-Pétersbourg, pour marquer une minute de silence puis lâcher ballons et colombes dans le ciel.

«Je ne pouvais pas ne pas venir», a déclaré à l'AFP Nika Kletskikh, 27 ans, qui a perdu une amie dans le drame. «C'est tellement effrayant de savoir qu'elle n'est plus là».

L'avion avait décollé samedi à l'aube de Charm el-Cheikh. Le contact a été perdu après 23 minutes de vol alors que l'appareil se trouvait à plus de 30 000 pieds (plus de 9000 mètres), son altitude de croisière.

Enquête aussi ouverte en Russie 

Des enquêteurs russes et égyptiens se sont rendus, en compagnie du ministre russe des Transports Maxime Sokolov, sur les lieux de l'écrasement, où ont été retrouvées les deux enregistreurs de vol, les «boîtes noires».

Une enquête a aussi été ouverte en Russie et les locaux de la compagnie et du tour-opérateur perquisitionnés, tandis que des enquêteurs de France et d'Allemagne étaient attendus en Égypte, une procédure habituelle pour tous les incidents impliquant un Airbus.

Les experts excluent que l'EI dispose des moyens militaires lourds nécessaires pour abattre un avion de ligne à 9000 mètres d'altitude.

En revanche, des experts interrogés par l'AFP refusent d'exclure, avant que les «boîtes noires» n'aient parlé, qu'une bombe ait pu exploser à bord ou que l'avion ait pu être touché par un missile tiré depuis le sol alors qu'il était descendu plus bas que son altitude de croisière pour une raison technique ou autre.

Plusieurs compagnies aériennes, dont Air France, Lufthansa et Emirates, ont annoncé qu'elles ne survoleraient plus le Sinaï «jusqu'à nouvel ordre», «par mesure de sécurité» et dans l'attente des résultats de l'enquête.