La capitale du Tchad, N'Djamena, a été frappée lundi pour la première fois par un double attentat-suicide qui a fait 23 morts, attribué à Boko Haram, le groupe islamiste nigérian contre lequel ce pays est en première ligne.

«Il n'y a pas de doute que Boko Haram est responsable et devra rendre compte de cette nouvelle horreur humaine», a déclaré le président français François Hollande, dénonçant un attentat «barbare», depuis Alger où il se trouvait en visite officielle.

Les deux attaques ont visé le commissariat central de N'Djamena et l'école de police, faisant 23 morts et 101 blessées, a annoncé le gouvernement tchadien dans un communiqué.

Quatre «terroristes» ont également été tués, selon le communiqué lu à la radio nationale, dans lequel le gouvernement assure que «la situation est sous contrôle». «Boko Haram se trompe de cible, ces terroristes sans foi ni loi seront débusqués et mis hors d'état de nuire où qu'ils soient», déclare encore le gouvernement.

Le double attentat n'avait toutefois pas été revendiqué lundi soir.

«Cette attaque ne découragera pas le Tchad de combattre ces bandits et le gouvernement poursuivra la lutte contre les criminels», assure le communiqué.

Réunion de crise

Plus tôt dans la journées, un responsable de la police de N'Djamena avait indiqué à l'AFP que deux kamikazes avaient attaqué simultanément le commissariat et l'école de police, où se trouvaient de nombreux stagiaires en formation.

Une autre source policière a souligné que le «modus operandi» portait la marque des islamistes de Boko Haram.

Après les attaques, de nombreuses forces se sont déployées dans la ville, où les mesures de sécurité avaient été considérablement renforcées depuis plusieurs mois face à la menace d'attaques du groupe islamiste.

Le gouvernement a tenu une réunion de crise en l'absence du président Idriss Déby Itno, qui devait rentrer d'Afrique du Sud où il a participé au sommet de l'Union africaine.

La France, l'ancienne puissance coloniale, a assuré le Tchad de son «soutien dans la lutte contre le terrorisme», dans une déclaration du ministère des Affaires étrangères.

Le Tchad est un allié de poids pour Paris dans la lutte contre les groupes djihadistes en Afrique sahélienne et l'armée française a établi à N'Djamena l'état-major de son opération Barkhane de lutte contre ces groupes.

Après le Mali, le président Déby a engagé son armée en février au Nigeria contre les islamistes nigérians, dont le chef Abubakar Shekau a menacé à plusieurs reprises de s'en prendre aux intérêts tchadiens.

Des attaques redoutées 

L'armée tchadienne participe en première ligne depuis février à une opération militaire régionale visant à chasser le groupe de pans entiers de territoire qu'il avait capturés dans le nord-est du Nigeria.

Fer de lance dans la guerre contre Boko Haram, le Tchad - comme le Cameroun voisin lui aussi engagé dans la guerre contre le groupe islamiste - redoutait depuis des mois des attentats de ce genre sur son sol. Il a toutefois déjà subi des raids de combattants de Boko Haram sur les rives du lac Tchad.

N'Djamena ne se trouve qu'à une cinquantaine de kilomètres du nord-est du Nigeria où sévissent les islamistes. Mais la ville, où est basé un important contingent militaire français, est relativement sûre et quadrillée par les forces de sécurité et les services de renseignements tchadiens.

Nigeria, Niger, Tchad, Cameroun et Bénin ont convenu le 11 juin, lors d'un sommet à Abuja, de mettre sur pied une force régionale dans le but de mieux lutter contre Boko Haram, désormais affilié au groupe djihadiste État islamique.

Condamnant le double attentat, le Secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a salué «le rôle courageux du Tchad dans la lutte contre Boko Haram», dans un communiqué.

Il a également salué la mise sur pied de la MNJTF (Multi-National Joint Task Force), la force régionale, et encouragé la coopération des pays d'Afrique centrale et de l'ouest dans la lutte contre Boko Haram.

La MNJTF, forte de 8700 hommes et sous commandement nigérian, aura son quartier général à N'Djamena.

Selon des sources militaires tchadiennes, environ 5000 soldats tchadiens sont engagés dans la lutte contre Boko Haram. En avril, N'Djamena avait déploré la mort de 71 soldats dans le cadre de cette opération.