La justice égyptienne a exécuté pour la première fois samedi l'une des centaines de condamnations à mort prononcées contre des partisans du président islamiste destitué Mohamed Morsi, en procédant à la pendaison d'un homme reconnu coupable de violences dans le nord du pays.

Depuis la destitution de M. Morsi par l'armée en 2013, des centaines de personnes ont été condamnées à la peine capitale dans des procès tenus en quelques minutes, qualifiés par l'ONU de «sans précédent dans l'histoire récente» du monde, mais aucune des sentences n'avait jusqu'à présent été appliquée.

Mahmoud Ramadan, pendu à 7 h 00 (minuit heure de Montréal), est «le premier de ceux impliqués dans les violences à avoir été exécuté», a indiqué à l'AFP le porte-parole du ministère de l'Intérieur, Hani Abdel Latif.

M. Ramadan et un autre manifestant avaient été condamnés à mort en mars 2014, reconnus coupables d'avoir jeté deux jeunes du toit d'un immeuble en marge de manifestations à Alexandrie  le 5 juillet 2013, au plus fort des tensions entre pro et anti-Morsi. Un des jeunes était décédé dans la chute.

Une vidéo amateur de la scène, largement partagée sur les réseaux sociaux, avait provoqué une vive émotion à travers le pays.

Utilisée comme élément de preuve durant le procès, on y voit plusieurs personnes monter sur un toit-terrasse pour s'en prendre à quatre jeunes hommes réfugiés au sommet d'une tourelle. L'un d'eux, qui semble être Mahmoud Ramadan, porte une imposante barbe et arbore un drapeau noir frappé de la profession de foi musulmane, un emblème utilisé par les djihadistes.

Un homme parvenu au sommet de la tourelle pousse ensuite l'un des jeunes, qui tombe de plusieurs mètres avant d'être frappé à coups de bâtons. Dans le même temps, un deuxième jeune est jeté du haut de la tourelle.

Outre les deux condamnés à mort, plusieurs dizaines de partisans de M. Morsi ont été condamnés dans la même affaire à des peines de prison pour manifestations et violences le 5 juillet 2013 dans le quartier de Sidi Gaber, à Alexandrie.

La pendaison de Mahmoud Ramadan est intervenue après écoulement de tous les recours judiciaires, a précisé le ministère de l'Intérieur sur sa page Facebook, alors que de nombreuses condamnations similaires ont été commuées en prison à perpétuité ou annulées en appel.

Procès de masse

Depuis que l'ex-chef de l'armée et actuel président Abdel Fattah al-Sissi a évincé M. Morsi le 3 juillet 2013, les autorités ont lancé une sanglante répression contre ses partisans, dont 15 000 ont été arrêtés et au moins 1400 tués.

Les Frères musulmans, dont est issu M. Morsi, ont été déclarés «organisation terroriste» et l'ex-président encourt la peine de mort dans quatre affaires, tandis que le guide suprême de la confrérie, Mohamed Badie, a déjà été condamné à la peine capitale et à la prison à perpétuité dans différents procès.

Les autorités sont accusées par l'opposition d'instrumentaliser la justice dans sa répression, et les procès de masse condamnant par centaines les pro-Morsi ont suscité un tollé international.

Parallèlement à la répression des partisans des Frères musulmans, dénoncée par des groupes de défense des droits de l'Homme, les attentats se sont multipliés en Égypte, souvent revendiqués par des groupes jihadistes qui ciblent avant tout les forces de l'ordre.

Un nouveau ministre égyptien de l'Intérieur, Magdy Abdel Ghaffar, a été nommé jeudi par le président Sissi, au moment où les forces de sécurité peinent à enrayer les attentats. M. Ghaffar a annoncé dès vendredi un vaste remaniement à la tête de la police, et désigné plusieurs assistants et commandants dans les provinces.