Le président togolais Faure Gnassingbé, au pouvoir depuis 10 ans, devrait être investi mercredi par son parti pour la prochaine élection présidentielle, au grand dam de l'opposition et la société civile qui veulent l'empêcher de briguer un troisième mandat.

Le parti au pouvoir, l'Union pour la République (Unir), a réuni mercredi, pour une convention d'investiture à Kara (420 km au nord de Lomé), plus de 700 délégués, tous vêtus de tee-shirts et casquettes blancs.

«Cette rencontre nous permettra de désigner (...) notre champion aux prochaines échéances électorales», a déclaré le deuxième vice-président de l'Unir, Foli-Bazi Katari, évoquant un «exercice» qui «à vrai dire n'est qu'une formalité».

Le slogan lancé durant la cérémonie d'ouverture a laissé encore moins de place au doute quant au choix du candidat pour la présidentielle: «Quand on est uni, on est fort derrière le président Faure».

M. Gnassingbé n'a pas assisté à la cérémonie d'ouverture, mais viendra dans l'après-midi pour la cérémonie d'investiture.

Lors d'un conseil des ministres mardi, le gouvernement du Togo, petit pays de sept millions d'habitants, a fixé au 15 avril la date de la présidentielle, à tour unique.

Sept personnalités ont déjà annoncé leur candidature.

Parmi elles figurent Jean-Pierre Fabre, chef de l'opposition, Kofi Yamgnane, un Franco-Togolais ayant été secrétaire d'État du président français François Mitterrand, ainsi qu'Alberto Olympio, homme d'affaires et petit-neveu du premier président togolais Sylvanus Olympio, assassiné lors d'un coup d'État en 1963.

Faure Gnassingbé avait été porté au pouvoir par l'armée en 2005 à la mort de son père, le général Gnassingbé Eyadema, autocrate ayant dirigé le Togo pendant 38 ans. Le fils a été élu président la même année, puis réélu en 2010, lors de scrutins contestés par l'opposition. En 2005, les violences électorales avaient fait, selon l'ONU, «entre 400 et 500 morts».

Après des études de finances et de gestion en France et aux États-Unis, Faure Gnassingbé était rentré au Togo au milieu des années 1990 pour devenir le «grand argentier» et conseiller financier de son père.

Discret et timide, réputé habile, il est le seul enfant du général Eyadema - sur la cinquantaine estimée - à être entré en politique.

Fin 2014, il avait provoqué la colère de l'opposition et de la société civile en n'excluant pas de briguer un troisième quinquennat. La Constitution togolaise le lui permet, car elle ne fixe plus aucune limitation des mandats présidentiels depuis que le général Eyadema a supprimé cette restriction en 2002.

«Maintenir la pression»

Les principaux partis de l'opposition ont tenté ces derniers mois de barrer la route à une troisième candidature de Faure Gnassingbé, sans succès.

Un premier projet de loi de réformes politiques visant à limiter le nombre de mandats présidentiels a été rejeté en juin 2014 par le Parlement, où le parti au pouvoir est majoritaire. Un autre texte a été introduit, mais n'a pu être voté, en raison de blocages dans les discussions depuis quelques semaines au Parlement.

En novembre et décembre 2014, l'opposition et la société civile avaient manifesté à plusieurs reprises à Lomé, mobilisant des milliers de personnes dans la rue pour exiger des réformes politiques instaurant la limitation des mandats présidentiels.

Un scénario similaire au Burkina Faso voisin, où le président Blaise Compaoré avait été chassé du pouvoir le 31 octobre - après 27 ans de règne - par la rue après avoir tenté de se représenter une énième fois à la présidentielle, est néanmoins très peu probable au Togo, selon les observateurs. Car contrairement au Burkina, l'opposition togolaise est très divisée et le pouvoir politique reste solidement soutenu par l'armée et les forces de sécurité.

«Nous allons toujours maintenir la pression sur le régime (...). Si nous sommes contraints d'aller aux élections sans les réformes, nous mobiliserons les populations à voter pour moi», a déclaré l'opposant Jean-Pierre Fabre.

Pour ses partisans en revanche, Faure Gnassingbé est «le seul choix» valable pour le Togo, estime Minzina Edimao, une étudiante espérant un nouveau mandat qui permettrait à son champion «de poursuivre les chantiers» en cours. Gustave Alaza, un conducteur de taxi-moto, loue avec enthousiasme «son charisme et surtout son expérience à la tête du pays».