L'ex-président égyptien Hosni Moubarak reste détenu dans un hôpital militaire après que la Cour de cassation a ordonné mardi un nouveau procès pour corruption, jusqu'à ce que le ministère public ou un tribunal se prononce sur sa remise en liberté, ont annoncé les médias d'État.

«M. Moubarak et ses fils n'ont pas été remis en liberté parce que la décision de la Cour de cassation n'a pas ordonné leur remise en liberté», selon ces médias. «La décision sera entre les mains du parquet général ou du nouveau tribunal qui va le rejuger», selon l'agence Mena.

L'ex-président égyptien sera rejugé dans la seule affaire de corruption qui le maintenait en détention à l'hôpital après l'annulation mardi par la Cour de cassation d'une précédente condamnation à trois ans de prison.

Le statut de détenu de l'ex-Raïs, âgé de 86 ans et à la santé précaire, demeure toutefois incertain.

Aucune source judiciaire n'a indiqué si cette décision de la Cour de cassation impliquait que Moubarak était libre. Mais son avocat Farid al-Deeb a assuré à l'AFP que c'est le cas, son client ayant «purgé sa peine» de trois ans. «Il restera toutefois dans cet hôpital militaire, car il est malade», a ajouté le défenseur.

En novembre, M. Moubarak avait déjà bénéficié d'un abandon, en appel, des accusations de meurtre de manifestants qui lui avaient valu la prison à vie en première instance. Mais il était resté en détention dans un hôpital militaire du Caire, dans le cadre de son procès pour corruption.

M. Moubarak a été emprisonné en avril 2011, après sa démission en février à l'issue d'une révolte populaire après 30 années au pouvoir.

L'Égypte est désormais dirigée par l'ex-chef de l'armée Abdel Fattah al-Sissi, élu président après avoir destitué l'islamiste Mohamed Morsi en juillet 2013 et réprimé dans le sang ses partisans.

Le président de la Cour de cassation a prononcé mardi l'annulation du jugement d'un tribunal qui avait condamné Moubarak à trois ans de prison en mai 2013 pour le détournement de plus de 14 millions de dollars d'argent public dans des travaux de rénovation de ses palais présidentiels. Le haut magistrat a également annoncé qu'il serait rejugé dans cette affaire, sans plus de détails sur son statut de détenu.

«Quelle que soit mon opinion concernant Moubarak, légalement, il doit être remis en liberté, car il a purgé sa peine ou il approche de la fin et, s'il demeure détenu, ce ne peut être que le résultat de pressions politiques», a estimé auprès de l'AFP l'avocat Gamal Eid, qui dirige l'ONG égyptienne Arabic Network for Human Rights Information.

La plus haute juridiction égyptienne a également annulé la condamnation à quatre années de prison de ses deux fils, Alaa et Gamal Moubarak, dans la même affaire de détournements.

Indifférence de l'opinion

Le 30 novembre, l'Égypte avait accueilli dans l'indifférence l'abandon des accusations contre l'ex-raïs pour son rôle dans la mort de 846 manifestants durant la révolte populaire dans la lignée des printemps arabes en janvier et février 2011. Cet abandon avait été motivé par d'obscurs «vices de procédure».

Le procureur général a fait appel de cette décision devant la Cour de cassation, laquelle doit maintenant décider d'ordonner un nouveau procès ou de confirmer l'abandon des poursuites.

La population, très majoritairement pro-Sissi et excédée par trois années de chaos politique et économique depuis la chute de Moubarak, avait peu réagi à la relaxe de l'ex-raïs.

De son côté, Washington, qui a renoué avec son allié-clé de la région après avoir du coin des lèvres dénoncé les excès de la répression après la destitution de M. Morsi, avait mis quelques jours à réagir. «Nous verrons comment le procès en appel se déroule», avait simplement commenté le département d'État.

Les organisations internationales de défense des droits de l'homme accusent régulièrement le nouveau régime de Sissi d'être plus autoritaire et répressif que celui de Moubarak, depuis qu'il a destitué et fait emprisonner Morsi, premier président élu démocratiquement après le Printemps égyptien de 2011.

Depuis sa destitution le 3 juillet 2013, plus de 1400 manifestants pro-Morsi ont été tués par la police ou l'armée et plus de 15 000 personnes, essentiellement des membres de sa confrérie islamiste des Frères musulmans, ont également été emprisonnées. Des centaines ont été condamnés à mort dans des procès de masse expédiés en quelques minutes et qualifiés par l'ONU de «sans précédent dans l'Histoire récente».

Le pouvoir de M. Sissi s'en est également pris à l'opposition laïque et de gauche, emprisonnant des dizaines de jeunes militants fers de lance de la révolte de 2011.